Retour au menu
Retour à la rubrique documents
JEANNE BOHEC, JEUNE FILLE EXPLOSIVE ET PLASTIQUEUSE à BICYCLETTE
Écoute ou téléchargement
Commentaires
Biographie ou informations
Musique : London Trios, Hob. IV:1-3, Haydn interprèté par European Archives
https://musopen.org/fr/music/5386-london-trios-hob-iv1-3/
No.2 in G major - I. Andante, II. Allegro
No.3 in G major - I. Spiritoso., II. Andante, III. Allegro
Texte ou Biographie de l'auteur
Jeanne Bohec, jeune fille explosive et plastiqueuse à bicyclette. Et un cheesecake aux poires épicées pour un anniversaire « La guerre est l'affaire des hommes. Mais les Allemands, qui ont menacé des femmes et asphyxié des enfants, ont fait que cette guerre est aussi l'affaire des femmes. Mais les Allemands et la police de Vichy ne connaissent pas le droit international et cette guerre est aussi l'affaire des femmes. » (Lucie Aubrac, discours sur les ondes de la BBC, 20 avril 1944.) jeanne-bohec Dans la mémoire collective reste profondément ancrée l'idée que la Résistance fût majoritairement masculine et que les femmes n'y furent qu'occasionnellement engagées et encore dans des tâches secondaires, certainement pas les armes à la main... Et pourtant une jeune Bretonne de vingt-cinq ans, haute comme trois pommes (1,49 mètre), légère comme une plume (47 kilogrammes), avec des yeux bleus, un teint pâle et des cheveux châtains va contribuer à pourrir considérablement la vie des Allemands en Bretagne du début de l'année 1944 à la libération. Jeanne Bohec naît à Plestin-les-grèves le 16 février 1919, il y a donc un siècle aujourd'hui, d'un père marin et sous-marinier dans la Royale. La famille de Jeanne suit comme d'autres familles de marins la grande troménie des ports militaires au gré des affectations : Lorient, Brest, Cherbourg, Rochefort ou Toulon. Mais c'est à Brest, non loin du berceau familial de son père à Lanmeur et de sa mère à Plestin, qu'elle se sent chez elle, s'enthousiasmant « Une merveille ces remparts de Brest ! Il y avait des mûres gorgées de soleil ». La petite fille grandit bercée par les histoires de balade sur ou sous la mer salée que lui conte son paternel qui a servi à bord des tout premiers sous-marins de 1906 à 1913 et qui, désormais retraité, a déposé son sac à terre. Brillante, la jeune Jeanne excelle dans des champs disciplinaires plutôt traditionnellement dévolus à ses camarades masculins : mathématiques, physique et chimie lui permettent de décrocher son baccalauréat puis d'entamer des études supérieures scientifiques alors que l'Europe gronde de bruits de bottes. Les premiers canons donnent de la voix tandis qu'elle murmure «Je ressentais le désir aigüe de faire quelque chose, mais quoi ? ». En mars 1940, elle postule comme aide-chimiste à la poudrerie du Moulin Blanc de Brest et décroche le poste. L'expérience acquise sera déterminante alors qu'elle suit de près dans la Dépêche de Brest les soubresauts de cette drôle de guerre. Le 18 juin 1940, apprenant l'arrivée imminente des Allemands dans la cité très stratégique du Ponant, elle prend ses cliques et ses claques et, sans prévenir ses parents, lève l'ancre à bord d'Abeille IV, un remorqueur en partance précipitée pour l'Angleterre. «En somme je n'ai pas eu de réactions différentes de celles d'un homme à ma place » dira-t-elle, très simplement. Elle n'apprend l'existence du général de Gaulle et de son appel historique qu'arrivée à Londres et s'engage immédiatement dans le Corps féminin des Volontaires Françaises, d'abord comme secrétaire puis comme chimiste dans un laboratoire étudiant la fabrication artisanale d'engins de sabotage. « Nous vivions dans une grande maison du centre de Londres transformée en caserne, à cinq ou six par chambrée. Tôt le matin, après l'appel et le petit déjeuner, deux fois par semaine, nous faisions l'exercice dans les rues avoisinantes, croisant parfois des équipes de Home-Guard, apprenant eux aussi les manoeuvres militaires. Puis c'était la dispersion, chacune se rendant à son travail. Les unes étaient secrétaires dans les différents services des Forces Françaises Libres, d'autres conductrices, infirmières, occupant tous les postes où il était admis qu'une femme pouvait remplacer un homme. » Il y avait là des femmes de tous âges et de toutes origines des territoires français : « Beaucoup de Bretonnes : Yvette Lhostis, encore plus petite que moi; Yvonne Guiziou; Le Quéré; Pessel; Cozic, jolie fille de Locminé; Bondu, qui traversa la Manche avec quelques marins sur une simple barque de pêche venant du Faouet; Nadine Smith. » Jeanne travaille d'arrache-pied au sein d'un laboratoire qui occupait la salle de travaux pratiques de chimie, dans les locaux du lycée français de Londres, sous la haute direction de M. Guéron, qui, après la guerre, deviendra directeur au Commissariat à l'Énergie atomique. La mission qui leur est confiée consiste à rechercher les meilleures manières de fabriquer des engins de sabotage avec des produits courants pouvant être achetés chez un pharmacien ou un droguiste, les résultats étant bien sûr destinés à la Résistance qui grandissait de jour en jour en France. Les précieuses connaissances scientifiques de Jeanne, son travail acharné et sa détermination sans faille à arracher son pays aux griffes des nazis l'amènent à demander en 1942 au Bureau Central de Renseignements et d'Action de partir pour la France instruire les résistants de ce qu'elle appelle « nos petites recettes ». Si l'engagement féminin va de soi pour les autorités britanniques, il n'en est pas du tout de même pour la Résistance militaire française, un brin machiste, qui s'organise outre-manche. Il n'est d'ailleurs à cet égard pas inutile de rappeler que les Anglaises ont décroché le droit de vote en 1918 alors que les Françaises ne l'obtiendront qu'en 1944. Les Français n'envisagent donc pas l'action des femmes dans cette période troublée au-delà des missions qui leur sont habituellement dévolues : infirmières, secrétaires voire, au plus, agent de liaison. Alors, formatrice d'artificiers, instructrice en sabotage ou combattante, vous n'y pensez pas ma chère ! En septembre 1943, son opiniâtreté et ses compétences l'emportent enfin : elle complète sa formation dans les écoles anglaises spécialisée - écoles de sabotage, de sécurité et de parachutage- avant de faire le grand saut. « Seule une autre de mes camarades fut également parachutée avec ce type de mission, témoignera-t-elle, mais, arrivée en France, son chef décida de ne l'employer que pour faire des liaisons, si bien que je fus la seule femme ayant été effectivement instructeur de sabotage. » Ah mais ! Sous un nom de code un peu ridicule on en conviendra, « Râteau » -à laquelle on a conféré le grade de sous-lieutenant- est donc parachutée enfin en France le 29 février 44, gagne la Bretagne, change de pseudonyme pour un « Micheline » sans doute plus facile à utiliser et commence tout de suite, sur les trois départements de l'ouest breton, la formation d'une cinquantaine de jeunes maquisards à l'art délicat du plastiquage et du sabotage. Lors du Plan Vert de sabotage des voies ferrées, elle fait elle-même sauter la voie Dinan-Questembert, en utilisant des détonateurs de sa fabrication. Et boum ! Elle participe activement à la vie du maquis de Saint-Marcel, vaste camp où furent parachutés les SAS du colonel Bourgoin et où trois mille cinq cents FFI du Morbihan furent armés grâce aux largages de 68 avions qui se succédèrent toutes les nuits du 6 au 18 juin. Après la dispersion du maquis, Jeanne dite Micheline effectuera de nombreuses liaisons entre les trois départements bretons, souvent juchée sur sa bicyclette ce qui faisait d'elle une délicate jeune demoiselle en promenade, dirigera plusieurs parachutages dans le Finistère et assistera, sans pouvoir toutefois y prendre part on le verra, aux combats de la libération de Quimper. En effet, les relations que Jeanne entretient avec les Résistants bretons seront toujours cordiales, simples et franches : il est vrai qu'il s'agissait de simples citoyens engagés dans la Résistance et non de militaires de carrière formatés par la Grande Muette et sa qualité de femme ne posa donc de problème à personne. « Je pense que si l'armée régulière était pleine de préjugés dus à des habitudes ancestrales -la guerre est, n'est-ce pas, l'affaire des hommes- l'armée des ombres étant quelque chose de tout nouveau, née des circonstances, il n'y avait pas de modèle préétabli à quoi se référer, d'où les femmes seraient exclues. » C'est d'ailleurs cette absence de discrimination et cette confiance réciproque qui lui sauvèrent la vie, fin juin 1944 : « Le chef départemental FFI du Finistère, Poussin, le lieutenant de gendarmerie Jamet, un radio et moi devions à la fin juin 44 nous transporter du Morbihan dans le Finistère dans une voiture de la gendarmerie. Mais comme je possédais une bicyclette, les hommes me laissèrent franchir les quatre-vingts kilomètres qui nous séparaient de Quimper avec cet engin, eux partant plus commodément en voiture. Or, ils furent arrêtés par les Allemands et fusillés, alors que je passais sans encombre... » C'est par contre avec les militaires de l'armée professionnelle que Jeanne déplora l'archaïque discrimination et le manque de confiance. « A Saint-Marcel, parmi plus de 2 000 FFI, se trouvaient les parachutistes SAS commandés par le colonel Bourgoin, 150 hommes environ qui encadraient les troupes du maquis. Le 18 juin 44, nous fûmes attaqués par les Allemands. Sans vouloir rivaliser avec les paras, il est certain que je connaissais mieux que la plupart des présents le maniement des armes, ayant reçu un entraînement approprié en Angleterre. Malgré cela, il me fut interdit par les paras de toucher à une arme et de me battre avec eux. » Il en fût de même lors des combats d'août 1944 pour la libération de Quimper : les FFI, armés grâce aux parachutages dirigés par Jeanne, étaient dirigés par un trio militaire composé d'un capitaine français, d'un Anglais et d'un Américain. Malgré sa demande pressante, irritée et réitérée, Jeanne n'obtint pas le droit d'être armée ni donc de prendre part aux combats au côté des maquisards : « Ce n'est pas la place d'une femme ! » lui asséna d'un air suffisant le capitaine français. Râteau, puis Micheline, pour tous « Plastiqueuse à bicyclette » -nom qu'elle donnera à son autobiographie en 1975-, bref Jeanne Bohec retournera à ses chères études dès la libération, deviendra professeur de mathématiques à Paris, maire-adjointe du XVIIIème arrondissement, porteuse infatigable mais discrète du témoignage de cette armée des ombres qui nous permet tous les jours aujourd'hui d'ouvrir nos volets sur un monde libre. Elle repose aujourd'hui à Plestin-les-Grèves après s'être éteinte en janvier 2010. On souhaite à cette éclatante jeune fille un très joyeux centième anniversaire ! Pour un joli cheesecake et six convives: Pour la base biscuitée: 180 g de sablés maison à la cannelle et au sucre de canne (c'est par ici http://gouezou.canalblog.com/archives/2014/07/05/30198514.html ) 75 g de beurre salé Pour la crème à la vanille et les poires épicées: 300 g de fromage blanc au lait entier qui s'égoutte tranquillement depuis la veille au frais 3 g de sel 100 g de crème fraîche épaisse 50g de sucre blond 1 cuillère à café de vanille Bourbon en poudre 2 gros oeufs du poulailler 5 poires parfumées type william, conférence, etc. (mûres mais tout de même encore fermes) Une demi-cuillère à café d'un mélange d'épices à dominante de cannelle (badiane, cardamome, girofle) Une noisette de beurre de ferme Un demi-citron jaune bio (zeste et jus) La veille, peler une des poires, ôter son coeur -en prenant soin de laisser la queue- la déposer dans une casserole, recouvrir d'eau froide, ajouter environ une cuillère à café de jus de citron et une pincée d'épices douces et de zeste finement râpé, porter à ébullition puis laisser cuire doucement sur feu très doux. Lorsque la poire est cuite, couvrir et laisser refroidir dans le bouillon parfumé. Le jour J, peler et découper les poires en dés. Les faire dorer dans le beurre et saupoudrer du reste d'épices douces et de zeste de citron très finement râpée. Laisser caraméliser à découvert à feu doux. Laisser refroidir. Préchauffer le four à 150°C. Réaliser d'abord la base biscuitée: faire fondre le beurre sur feu doux. Réserver. Dans un mixeur, réduire les biscuits en poudre. Mettre la poudre de biscuit dans un saladier, y ajouter le beurre fondu et mélanger intimement. Verser ce mélange au fond d'un moule (le mieux étant d'utiliser un cercle à bords hauts posé sur une plaque à pâtisserie et sur une feuille de papier sulfurisé). Tasser du bout des doigts en tapotant en ménageant un petit bord pour guider la crème et la contenir pendant la cuisson. Placer la plaque au frais. Dans un saladier, mettre le fromage blanc, le sel, la crème, le sucre et la vanille. Mélanger intimement mais rapidement (car il ne faut pas rendre l'appareil liquide en le fouettant trop). Ajouter les deux oeufs et mélanger. Garnir le moule de la moitié des poires caramélisés puis de la préparation fromage blanc, lisser la surface avec le dos d'une cuillère à soupe et enfourner pour 30 minutes. Au bout de ce temps-là, le cheesecake doit être encore un peu tremblotant, c'est très important. Eteindre le four et laisser refroidir complètement toujours dans le four, porte fermée. Placer ensuite au frais -mais pas au réfrigérateur- pendant environ quarante-huit heures. Toutefois, il est tout à fait possible de craquer et de dévorer le gâteau à peine refroidi, voire tiède... Question de capacité de résistance à la tentation et de maîtrise de soi. Très personnel donc. Au moment de servir, donc, déposer la poire entière refroidie et égouttée et l'entourer du reste des poires caramélisées. Avant de décercler passer un petit couteau bien aiguisé sur le tour du gâteau puis ouvrir le cercle et l'ôter délicatement. Faire glisser tout doucement le cheesecake de la feuille de cuisson au plat de service. Servir en chantant « Joyeux anniversaire ! ».
Source: http://www.gouezou.canalblog.com
Retour à la rubrique documents
Retour au menu