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Musique : Tomaso Albinoni, menuet n°9 allegro ma non tropo, licence Musopen.Louis XIV fùt, comme on sait,le plus bel homme et le mieux fait de son royaume. C'était lui que Racine désignait dans Bérénice par ces vers: "Qu'en quelque obscurilé que le sort l'eût fait naître, Le monde, en le voyant, eût reconnu son maître." Le roi sentit bien que cette tragédie, et surtout ces deux vers, étaient sincères. Je suis obligé de renouveler mes justes plaintes an sujet de toutes les éditions qu'on a faites jusqu'à présent de mes ouvrages dans les pays étrangers. Ce serait, à la vérité, un honneur pour,la littérature de notre patrie que ces fréquentes éditions qu'on fait ailleurs des livres français, si elles étaient faites avec fidélité et avec soin. Mais elles sont d'ordlnaire si défigurées, on y mêle si souvent ce qui n'est pas de nous avec ce qui nous appartient, on altère si barbaremenî le sens et le style, que cet honneur devient en quelque manière honteux et ridicule. Jje ne suis pas assurément le seul qui s'en soit plaint, et qui ait prémuni le public contre ce brigandage; mais je suis peut-être celui qui ait le plus la raison de me plaindre. L'édition des Ledet d'Amstedam, et celles d'Arkstée et Mirkus, sont surtout pleines, à chaque page, de fautes et d'infidélités si grossières, qu'elles, doivent révolter tout lecteur on a même noussé faits pour lui. Rien n'embellit d'ailleurs comme une couronne. Le son de sa voix était noble et touchant. 'Tousles hommes l'admiraient, et toutes les femmessoupiraient pour lui. Il avait une démarche qui ne pouvait convenir qu'à lui seul, et qui eut été ridicule en tout autre. Il se corn plaisait à en imposer par son air. L'embarras de ceux qui lui parlaient était un hommage qui flattait sa supériorité. Ce vieil officier qui, en lui demandant une grâce, balbutiait, recommençait son discours, et qui enfin lui dit sire, au moins je ne tremble pas ainsi devant vos ennemis, il n'eut pas de peine à obtenir ce qu'il demandait. La nature lui avait donné un tempérament robuste. Il fit parfaitement tous ses exercices, jouait très-bien à tous les jeux qui demandent de l'adresse et de l'action; il dansait les danses graves avec beaucoup de grâce. Sa constitution était si bonne qu'il fit toujours deux grands repas par jour sans altérer sa santé ce fut la bonté de son tempérament qui fit l'égalité de son humeur. LouisXIII, infirme, était chagrin, faible, et difficile.Louis XIV parlait peu, mais toujours bien. Il n'était pas savant; mais il avait le goût juste: Il entendait un peu l'italien et l'espagnol, et ne put jamais apprendre le latin, que l'on montre toujours assez mal dans une éducationparticulière, et qui est de toutes tes sciences la moins utile à un roi. On a imprimé sous son nom une traduction des Commentaires de César. Ce sont ses thèmes; mais on les faisait avec lui il y avait peu de part; et on lui disait qu'il les avait faits. J'ai ouï dire au cardinal de Fleury que Louis XIV lui avait un jour demandé ce que c'était que le prince qtiemadmodum mot sur lequel un musicien, dans un motet, avait prodigué, selon leur coutume, beaucoup de travail; le roi lui avoua, à cette occasionl qu'il n'avait presque jamais rien su de cette langue. On eût mieux fait de lui enseigner l'histoire, la géographie, et surtout la vraie philosophie, que les princes connaissent si rarement. Son bon sens et son goût naturel suppléèrent à tout. En fait des beaux-arts, il n'aimaitque l'excellent. Rien ne le prouve mieux que l'usage qu'il fit de Racine'; de Boileau, de Molière, de Bossuet, de Fénelon, de Lebrun, de Girardon, de Le Nôtre, etc. Il donna même quelquefoisà Quinault des sujets d'opêrâj et ce fut lui qui choisit Armide. M. Colbert ne protégea tous les arts, et ne les fit fleurir que pour se conformer au goût de son maître; car M.Colbert, étant sans lettres, élevé dans le négoce, et chargé par le cardinal Mazarinde détails d'affaires, ne pouvait avoir pour les beaux-arts ce goût quedonne-naturellement une cour galante, à laquelleil fautdes plaisirs au-dessusdu vulgaire. M. Colbert était un peu sec et sombre; ses grandes vues pour la finance et pour le coml'abusde la presseJusqu'à insérerdansces éditionsdespiècesscandaleuses, digneslie la plusvilecanaille. Je meflaltsiquelepuhlicaura pourellesle mente méprisque moi; onsait assezquel excès punissableplusieurslibrai es de Hollandeont poussaleurlicence.Ceslivresaussi odieuxque malfaits, qu'ils Âébtëntet qu'Usregardentuniquementcommeun objetde commerce,ne font tort Apersonne, si ce n'estaux lecteurscrédulesqui achètent iihprudem- servadanssa disgrâce*II ne fit d'abord que de mauvaischoix; et, lorsque Louis XIV,en 1662, voulut favoriser les letires,\en donnant des pensions aux hommesde génie, et même aux savants, 'Colbertne s'en rapporta qu'à ce chapelain dont le nom est devenu depuis si ridicule, grâce à ses ouvrage?et à Boileau maisil avait alors une grande réputation qu'il s'était faite par un peu d'érudition, assez de critique et beaucoup d'adresse c'estce choix qui indigna Boileau, jeune encore, et quilui inspira tant detraits satiriques. M.Colbert se corrigea depuis, et fayorisaceuxqui avaient destalents véritables, et qui plaisaientau maître. Cefut LouisXlVjqui, de son propre mouvement, donna des pensions à Boileau, à Racine, à Pellisson, à beaucoup d'autres; il s'entretenait quelquefoisavec eux; et même lorsque Boileau se fut retiré à Auteuil, étant affaibli par l'âge, et qu'il vint faire sa cour au roi pour la dernière fois, le roi lui dit: « Si votre santé vous permet de venir encore quelquefois à Versailles, j'aurai toujours une demi-heure a vousdonner. ;o Au mois de septembre 1690,il nomma Racine du, voyage de Marly; et il se faisait lire par lui les meilleurs ouvrages dii temps: L'année'd'auparavant ilavaitgratiflé Racineet Boileau,chacun de mille pistoles, qui font vingt mille livres d'aujourd'hui, pour écrire son histoire, et il avait ajouté à ce présent quatre mille livres de pension. ' On voit évidemment par toutes ces libéralités répandues de son propre mouvement, et surtout par sa faveur accordée à Pellisson, persécuté par Colbert, que ses ministres ne dirigeaient point son goût. Il se porta de lui-même à donner des pensions à plusieurs savants étrangers; et M. Colbertconsulta M.Perrault sur le choix de ceux qui reçurent cette gratification si honorable pour eux et pour le souverain. Un de ses talents était de tenir une cour; il rendit..la sienne la plus magnifique et la plus galante de l'Europe. Je ne sais pas comment on peutlire encore des descriptions de fêtes dansdes romans, après avoir lu celles que donna Louis XIV.Les fêtes de Saint-Germain, de Versailles, ses carrousels, sont au-dessus de ce que l'imagination la plus romanesque inventé. Il dansait d'ordinaire à ces fêtes avec les plus belles personnesde Ja cour; il semblait que la nature eût fait des efforts pour seconder le goût, de Louis XIV..Sa cour était !empHe:des> hommes les mieux faits de l'Europe, et il y avait à la foie plus de trente femmes d'une beauté accomplie. Onavait soin de composer des dansesfigurées, convenablesà leurs caractères et à leurs galanteries. Souvent mêmeles pièces qu'on représentait étaient rempliesd'allusions Hues, qui avaient rapport aux intérêts secrets de leurs coeurs. Non-seulement il y eut de ces fêtes publiques dont Molière et Lulli.firent tes principaux ornements, mais il y en eut de particulières, tantôt pour Madame, befie-steur du roi, tantôt pour Mraa de La Valiière: il n'y avait que peu de courtisans qui y fussent admis;c'était souvent Benserade qui eu faisait les vers, quelquefoisun uorniné Bellot, valet 140 ANECDOTES. '1. ..1~- vl~s -1. .on dn n de chambre du roi. J'ai vu des canevas de ce dernier, corriges de Il main de LouisXIV. On connaît ces vers galants que faisait Benserade pour ces Mets figurés, où le roi dansait avecsa cour; il y confondais presque toujours, par une allusion délicate, la personne et le rô:e Par exemple, lorsque le roi, dans un de ces ballets, représentait ApoJ ton, voici ce que lit pour lui Benserade: Je doute qu'on le prenne avec vous sur le ton De Daphné, ni de Phaéton, Lui trop ambitieux, elle trop inhumaine. Il n'est point là de piège où vous puissiez donner; Le moyen de s'imaginer Qu'une femmevous fuie, ou qu'un homme vous mène! Lorsqu'il eut marié son petit-fils le duc de Bourgogne à la princesse Adélaïdede Savoie, il fit jouer des comédies pour elle dans un des appartements de Versailles. Duché, l'un de ses domestiques, auteur du bel opéra à'iphigénie, composala tragédie d'Absalon pour ces fêtes secrètes; Madamela duchesse de Bourgogne représentait la fille d'Absalon; le duc d'Orléans, le duc de La Vallière, y jouaient; le fameux acteur Baron dirigeait la troupe, et y jouait aussi. 11 y avait alors appartement trois fois la semaine à Versailles; la galerie et toutes les pièces étaient remplies; on jouait dans un salon; dans l'autre il y avait musique; dans un troisième, une collation. Le roi animait tous ces plaisirs par sa présence. Quelquefois il faisait dresser dans la galerie des boutiques garnies de bijoux les plus précieux il en faisait des loteries, ou bien on les jouait à la rafle, et Madamela duchesse de Bourgogne distribuait souvent les lots gagnés. C'était au milieu de tous ces amusements magnifiques, et des plaisirs les plus délicats, qu'il forma ces vastes projets qui firent trembler l'Europe; il mena la reine et toutes les dames de sa cour sur la frontière. Ala guerre de 1667 il distribua pour plus de cent mille écus de présents, soit aux seigneurs flamands qui venaient lui rendre leurs respects, soit aux députés des villes; soit aux envoyés des princes qui venaient le complimenter; et il suivait encela son goût pour la magnificence, autant que la politique. C'est sur quoi on rie peut assez s'étônnerqu'on l'ait osé accuser d'avarice dans presque toutes les pitoyables histoires qu'on a compilées de son règne jamais prince n'a plusdonné, plus à propos, et de meilleure grâce. Les plaisirs nobles dont il occupasans cesse la plus brillante cour du monde ne l'empêchèrent point d'assister régulièrement à tous ses conseils; il les tenait même pendant qu'il était malade,et il ne s'en dispensa qu'une fois pour aller à la chasse il avait peu d'affaires ce jour-là il entra pourdire qu'il n'y aurait pointde conseil, et ledit enparodiant ainsi sur-le-champun air d'un opéra de Quinaullet de JLulli: Le conseil à ses yeux beau se présenter, Si tût qu'il voit sa chienne, il quittetoutpour. elle; Rienne peut l'arrêter Quand la chatte l'appellt. SURLOUISXIV. 1748. 141 Il avait fait quelques petites chansons dans ce goût aisé et naturel; et dansles voyages en Franche-Comté,il faisait f ire des impromptus à ses courtisans, surtout à Pellisson, et au marquis de Dangcau. Il rejouai} pas mal de la guitare, qui était alors à la mode, et se connaissait trèst bien en musique comme en peinture. Dans ce dernier art, il n aimaique les sujets nobles. LesTeniers et les autres petits peintres flamands ne trouvai nt point grâce devant ses yeux: « Otez-moices magots-là,*»s~ dit-il un jour qu'on avait mis un leniers dans un de ses appartements. Malgréson goût pour la grande et noblearchitecture, il laissa subsister l'ancien corps du château de Versailles,avec les sept croiséesde face, et sa petite cour de marbre du côtf de Paris. Il n'avait d'abord destiné cechâlëau qu'à un rendez-vous de chasse, tel qu'il avait été du temps de Louis XIII, qui l'avait acheté du secrétai e d'État Loménie. Petit à petit il en fit ce palais immensedont la façadedu côté des jardins est ce qu'il y a de plus beau dans le monde, et dont l'autre façadp est dans le plu- peti' et le plus mauvais goût; il dépensa à ce parais et aux jard.ns plus de cinq cents millions, qui en font plus de neuf cents de notre espèce actuelle. M. le duc de Créqui lui di.-ait: Sire, vous avez beau faire, vous n'en ferez jamais qu'un favori sans mérite. » Les chefs-d'oeuvre de sculpture furent prodigués dans ses jardins. Il en jouissait, et les allait voir souvent. J'ai ouï dire à feu M. le duc d'Antinque,lorsqu'il fut surintendant des bâtiments, il faisait quelquefois mettre ce qu'on appe.le des cales entre les statues et les socles,t afin que quandle roi viendrait se promener, il s'aperçût que les statues n'étaient pas droites, et qu'il eût le mérite du coup"d'oeil. En effet, le roi ne manquait pas de trouver le défaut. M.d'Antin contestait un peu, et ensuite se rendait, et faisait redresser la statue, en avouant avec une surprise affectée combien le roi se connaissait à tout. Qu'onjuge par cela seul combien un roi doit aisément s'en faire accroire. Qn sait le trait decourtisan que fit ce même duc d'Antin, lorsque le roi vint coucherà Petitliourg, et qu'ayant trouvé qu'une grande allée de vieux arbres faisait un mauvais effet, M.d'Antin la fit abattre et enlever ta mêmenuit; et le, roi, à son réveil, n'ayant plus trouvé son allée, il lui dit « Sire, comment vouliez-vousqu'elle osât paraître encore devant vous?elle vous avait déplu. » Cefut le même duc d'Antin qui, à Fontainebleau, donna au roi et à Madamela duchessede Bourgogne un spectacle plus singulier, et un exemple plus frappant du raffinement de la flatterie la plus délicate. Louis XIVavait témoignéqu'il souhaiterait qu'on abattit quelquejour unbois entier qui lui fitait un peu de vue. M.d'Antinfit scier tous les arbres du bois près dela racine, de façon qu'ils ne tenaient presque plus des cordesétaient attachées à chaque corps d'arbre, et ptus de douze cents hommes étaient dans, ce bois prêts au moindre M. signal. d'Antin.savait le jour quele roi devaitse promener de ce côté avec toute sa cour. Sa Majesténe manqua pas de dire combience morceau de forêt lui déplaisait. « Sire, lui répondit-il, ce bois sera abattu dès que Votre Majesté l'aura ordonné. Vraiment,dit le roi, s'il ne tient qu'à cela, je l'ordonne, et je voudrais déjà en être défait. Hébien, J4S ANECDOTES sire, vous allez l'être. » 11 donna un coup de sifflet, et on vit tomber la forêt. a Ah!mesdames, s'écria Madamela cl ^liessede Bourgogne, si le roi avait demandé nos têtes, M.d'Antin les ferait'tomber de même. » Bon mot un peu vif, mais qui ne tirait point à conséquence. C'est ainsi que tous les courtisans cherchaient à lui plaire, chacun selon son pouvoir et son esprit. Il le méritait bien, car il était occupé lui-même de se rendre agréable à tout ce qui l'entourait; c'était un commerce continuel de tout ce que la majesté peut avoir de grâces sans jamais se dégrader, et de tout ce que l'empressement de servir et de plaire peut avoir de finesse sans l'air de la bassesse. Il était surtout avec les femmes d'une attention et d'une politesse qui augmentait-encore celle des courtisans, et il ne perdit jamais l'occasion de'dire aux hommesde ces choses qui flattent l'amour-propre en excitant l'émulation, et qui laissent un long souvenir. Unjour, Madamela dauphine,voyantà sonsouper un officierqui était trjs-laid plaisanta beaucoupet très-haut sur sa laideur Je le trouve, madame, dit le roi encore plus haut, un des plus beaux hommes de mon royaume, car c'est un des plus braves. » Le comte de Marivault, lieutenant général, homme un peu brutal, et qui n'avait pas adouci soncaractère dans la Courmême de LouisXIV,1 avait perdu un bras dans une action, et se plaignait un jour au roi, qui l'avait pourtant récompensé autant qu'on peut le faire pour un bras cassé « Je voudrais avoir perdu aussi ,1'autre, et né plus servir Votre Majesté. J'en serais bien fâché pour vous et pour moi, » lui répondit Louis XIV; et ce discours fut suivi d'une grâce qu'il lui accorda. Il était si éloigné de dire des choses désagréables, qui sont des traits mortels dans la bouche d'un prince, qu'il ne se permettait pas même les plus innocentes et les plus douces railleries, tandis que les particuliers en font tous les jours de si cruelles et de si funestes. Il faisait un jour un conte à quelques-unsde ses courtisans, et même il avait promis que le conte serait plaisant; cependant il le futsi peu que l'on ne rit point, quoique le conte fût du roi. M^le prince d'Armagnac, qu'on appelait M.Le Grand, sortit alors de la chambre, et le roi dit à ceux qui restaient « Messieurs, vous avez trouvé mon conte fort insipide, et vous avez eu raison mais je me suis aperçu qu'il y avait un trait qui regarde de loin M.Le Grand, et qui aurait pul'embarrasser j'ai mieux aimé le supprimer que de hasarder de lui déplaire : maisà présent qu'il est sorti, voici mon conte; » l'acheva, et on rit. On voit par ces' petits traits combien il est faux qu'il ait jamais laissé échapper ce discours dur et révoltant dont on l'accuse Qu'importe lequel de ma valets meserve? c'était, dit-ont .pour mortifier M.de La Rochefoucauld. LouisXIV était,incapable d'une telle indécence. Je in'en-suis informéà tous ceux qui approchaient de sa personneils m'ont. tous dit quec'était un conte impertinent; cependant il est répété et cru d'un bout de la Franceà l'autre. Les petites calom.. nies font fortune comme les grandes. Comment des paroles si odieuses pourraient-elles se concilier avec ce qu'il dit aumême duc de La Rochefoucauld qui était embarrassé de dettes :.Quene parle%-voiisà vos SORLOUISXIV. 1748. l«tè amis? mot qui lui-même valait beaucoup, et qui rut accompagne a un don de cinquante mille écus. Quand il reçut un légat qui vint lui faire des excusesau nom du pape, et un doge de Gênes qui vint lui demander pardon, il ne songea qu'à leur plaire. Ses ministres agissaient un peu plus durement. Aussi le doge Lescaro, qui était un homme d'esprit, disait « Le roi nous ôte la liberté en captivant nos coeurs, maisses ministres nous la rendent. » Lorsqu'en 1686 il donna à son fils le grand dauphin le commandement de son armée, il lui dit ces propres mots « En vous envoyant commander mon armée, je vous donne les occasions de faire connaîtr votre mérite c'est ainsi qu'on apprend à régner il ne faut pas, quand je viendrai à mourir, qu'on s'aperçoive que le roi est mort. » Il s'exprimait presque toujours avec cette noblesse. Bien ne fait plus d'impression sur les hommes, et on ne doit pas, s'étonner que ceux qui.i l'approchaient eussent pour lui une espèce d'idolâtrie. il est certain qu'il était passionné pour la gloire, et même encore plus que pour la réalité de ses conquêtes. Dans l'acquisition de l'Alsace et de là moitié de la Flandre, de toute la Franche-Comté, ce qu'il aimait le mieux était le nom qu'il se faisait. En effet, pendant plus de cinquante ans, il n'y eut en Europe aucune tête couronnée que ses ennemis mêmes osassent seulement mettreavec lui en comparaison. L'empéreur Léopold, qu'il secourut quelquefois et humilia toujours, n'était pas un prince qui pûtdisputer rien au roi de France. Il n'y eut de son temps aucun empereur turc qui ne fût un homme médiocre et cruel. Philippe'IV et Charles Il étaient aussi faibles quela monarchie espagnole l'était devenue Charles II d'Angleterre ne songea à imiter LouisXIVque dans ses plaisirs. Jacques II ne l'imita que dans sa dévotion, et il profita mal des efforts que fit pour lui son protecteur. GuillaumeIII souleva l'Europe contre Louis XIV; maisil ne put l'égaler ni en grandeur d'âme, ni en magnificence, ni en monuments, ni en rien de ce qui a illustré ce beau règne. Christine, en Suède, ne fut fameuse que par son abdication et sonesprit. Les rois de Suède ses successeurs, jusqu'à Charles XII, ne firent presque rien de digne du grand Gustave; et Charles XII, qui fut un héros, n'eut pas la prudence qui en eût fait un grand homme. Jean Sobieski en Pologne eut la réputation d'un brave général, maisne put acquéri celle d'ungrand roi. EnfinLouis XIV, jusqu'à la bataille d'Hochstedt, fut le seul puissant, le seul magnifique, le seul grand presque en tout genre. L'hôtel de ville de Paris lui décerna ce nom de,Grand en 1680, et l'Europe, quoique jalouse, le confirma.' On l'a accusé d'un faste et d'un orgueil insupportables, parce que ses statues à la place Vendôme et à celle des Victoires ont des bases ornées d'esclaves enchaînés. On ne veut pas voir que celle du .grand, du clément, de l'adorable Henri IV sur le Pont-Neuf, est aussi accompagnéede quatre esclaves; que celle de LouisXIII, faite anciennement pour Henri II, en a. autant, et que celle même du grand-duc Ferdinand de Médicisà Livournea les mêmesattributs. C'estun usage des sculpteurs,plutôt qu'un monument de vanité. On érige ces monu144 ANECDOTES ments pour les rois, comme on les habille, sans qu'ils y prennent garde. Il était si peu amoureux de cette fausse gloire qu'on lui reproche, qu'il fit ôter de la galerie de Versailles les inscriptions pleines d'enflure et de faste que Charpentier de l'Académie française avait mises à tous les cartouches L'incroyable passage du Rhin, La sage conduite du Soi, La merveilleuse entreprise de Valenciennes, etc. Louis XIVsupprima toute»ifes épithètes, et ne laissa que les faits. L'inscription qui est à Paris à la porte Saint-Denis, et qu'on iui a reprochée, est à la vérité insultante pour les Hollandais; mais elle no contient pour Louis XIV aucune louange révoltante II n'entendait point le latin, comme on l'a dit; il n'alla presque jamais à Paris, et peut-être n'a-t-il pas plus entendu parler de cette inscription que de celles de Santeuil, qui sont aux fontaines de la ville. Il serait à souhaiter, après tout, que nous ne laissassions subsister aucun monument tmmiliant pour nos voisins, et que nous imitassions en cela les Grecs. qui, après la guerre du Péloponése, déiruisirent tout ce qui pouvait réveiller l'animosité et la haine. Les misérables histoires de Louis XIV disent presque toutes que l'empereur Léopoldfit élever une pyramide dans le champ de bataille d'Hochstedt cette pyramide n'a existé quecette pyramide n'a existé que dansdes gazettes; et je me souviens que M. le maréchal de Villars me dit qu'après la prise de Fribourg, il envoya cinquante maîtres sur le champ où s'était donnée cette funeste bataille, avec ordre de détruire la pyramide en cas qu'elle existât, et qu'on n'en trouva pas le moindre vestige. Il faut mettre ce conte de la pyramide avec celui de la médaille du STAsot, arrête-loi, soleil, qu'on prétend que les états néraux avaient gé- fait frapper après la paix d'Aix-la-Chapelle sottise à laquelle ils ne pensèrent jamais. Leschoses principales dont LouisXIV tirait sa gloire étaient d'avoir, au commencement de son règne, forcé la branche d'Autriche espagnole, qui disputait depuiscent ans la préséance à nos rois, à la céder pour jamais en 1661 d'avoir entrepris, dès 1664, la jonction des deux mers; d'avoir réformé les lots en .1667 d'avoir conquis la même année la Flandre française en six semaines; d'avoir pris l'année suivante la Franche-Comté en moins d'un mois au coeur de l'hiver; d'avoir su ajouter à la France Dunkerque et Strasbourg. Que l'on ajoute à ces objets, qui devaient le flatter, une marine de près de deux cents vaisseaux, en comptant les alléges; soixante mille matelots enclassés en 168!, outre ceux qu'il avait déjà formés; le port de Toulon, celui de Brest et de Rochefort bâtis; cent cinquante citadelles construites; l'établissement des Invalides, de Saint-Cyr, l'ordre de Saint-Louis, l'Observatoire, l'Académie des sciences, l'abolition du duel, l'établissement de la police, la réforme des lois, on verra que sa gloire était fondée. Il ne fit pastout ce qu'il pouvait faire, mais il fit beaucoup plus qu'un autre. Quandje dirai que tous les grandsmonumentsn'ont rien coûté à l'Etat qu'ils ont embelli, je ne dirai rien que de très-vrai. Lepe; pie croit qu'un prince qui dépense beaucoup en bâtiments et en établissementsruine son royaume; mais en effet il l'enrichit; il répawi SURLOUISXIV. 1748. 145 VoiTAIRE XXIV 10 de l'argent parmi une infinité d'artistes; toutes les professions y gagnent; l'industrie et la circulation augmentent le roi qui fait le plus travail-. ler ses sujets est celui qui rend son royaume plus florissant. Il aimait les louanges, sans doute, mais il ne les aimait pas grpssières; et les caractères qui sont insensibles aux justes louanges n'en méritent d'ordinaire aucune. S'il permit les prologues d'opéra dans lesquels Quinault le célébrait, ces éloges plaisaient à la nation, et redoublaient la vénération qu'elle avait pour lui. Les éloges que Virgile, Horace, et Ovide même, prodiguèrent à Auguste, étaient beaucoup plus forts; et, si on songe aux, proscriptions, ils étaient assurément bien moins mérités. Louis XIV n'adoptait pas toujours les louanges dont on l'accablait. L'Académie française lui rendait régulièrement compte des sujets qu'elle Droposait pour Je prix. Il y eut une année où elle avait donné pour sujet du prix, laquelle de toutes les vertus du roi méritait la préférence il ne voulut pas recevoir ce coup d'encensoir assommant, et défendit que ce sujet tût traité. Il résulte de tout ce qu'on vient de rapporter que jamais homme n'ambitionna plus la vraie gloire. La modestie véritable est, je l'avoue, au-dessus d'un amour-propre si noble. S'il arrivait qu'un prince, fait ayant d'aussi grandes choses que Louis XIV, fût encore modeste, ce prince serait le premier homme de la terre, et Louis XIV le second i Sédition de 1748 contient de plus ici les huit alinéas suivants, dont le premier seul a ete reproduit dans le Mercure, en 1750. 'Une preuve incontestable de son excellent caractère, c'est la longue lettre qu'il écrivit à M. Le Tellier, archevêque de Reims, que j'ai eu le bonheur de voir en original* Il.était très-mécontent de M.de Barbezieux, neveu de ce prélat, auquel il avait donne la place de secrétaire d'État du célèbre Louvois, son père. Il ne voulait pas dire des choses dures à M. de Barbezieux; il écrit à son oncle pour le prier de lui parler et de le corriger: Je sois ce que je dois, dit-il, à la mémoire de.M. de Louvoie mais si votre neveu ne change de conduite, je serai forcé avec douleur à prendre un parti. Ensuite il entre dans un long détail de toutes les fautesqu'il reproche à son ministre,, commeun père de famille tendre et instruit de ce qui se passe dans sa maison. Il se plaint que M.de Barbezieux pelait pas un assez bon usage de ses grands talents; qu'il néglige quelquefois les affaires pour les plaisirs qu'il fait attendre trop longtempsles officiersdans son antichambre; qu parte avec trop de hauteur et de dureté. La lettre est assurément J un roi et d'un père. « Dans mille !îbelle» qu'on a écrits contre lui, on lui a reproché ses amours avec la plus grande amertume; mais quel est celui de tous ceux qui l'accusent qui n'ait eu Ta mêmepassion? Il est plaisant qu'on ne veuille pas donner à un roi une liberté que les moindres de ses sujets prennent si hautement a Ceuxqui n ont jamais connu cette passion sont d-ordinaire des caractères durs et impitoyables. Une femmedigne.d'être aimée adoucit les moeurs; elle est la seule qui puisse dire à un prince des vérités utiles, qu'il n'entendrait peut- être pas sans honte et sans dépit de la bouche d'un homme, et qu'un homme même n'oserait pas.dire. Louis XIV fut heureux dans tous ses choix,.et il le lSuJrieSnSt ^pdaasn. sDseess deinxfaléngtsit,imensa,tudreeulsx; il en eut dix légitimés, et deux qui ne e vécurent eurent moururent dans leur enfance les huit qui tous du Les princesses furent aimables, le duc du Marnent le çqmte,de Toulouse furent des princes très-sages. Le comte de Verïmetettatiaîit bâïcpÙT^ leUD*' et qui était amiral aVant comte deTo .louse, pro- beaucoup. rf.D" ans les d^I#I'ef>J>Wçirës de Louis XIV, on prétend que ce, fut Mme de jMontespan qui produisit elle-même Mmede Maintenon à la cour; on se trompe.. Cefut le due de Richelieu, père dupremier gentilhomme de la&ambret VdlTAIRE XXIV inn 146 ANECDOTES Toutes les histoires imprimées en Hoiianae reprocnem a i*juis ai y la révocation de l'édit de Nantes. Je le crois bien; tous ces livres sont écrits par des protestants. Ils furent des ennemis d'autant plus implacables de ce monarque, qu'avant d'avoir quitté le royaume, ils étaient des sujets fidèles. Louis XIV ne les chassa pas comme Philippe III avait chassé les Maures d'Espagne, ce qui avait fait à la monarchie espagnole une plaie inguérissable. Il voulait retenir les huguenots, et les convertir. J'ai demandé à M. le cardinal de Fleury ce qui avait principalement engagé le roi à ce coup d'autorité. Il me répondit que tout venait de M. de Baville, intendant de Languedoc, qui s'était flatté d'avoir aboli ie calvinisme dans cette province, où cependant il restait plus de quatre-vingt mille huguenots. Louis XIV crut aisément que, puisque un intendant avait détruit la secte dans son département il l'anéantirait dans son royaume. M de Louvois consulta sur cette grande affaire M. de Gourvilje, que le roi Charles II d'Angleterre appelait le plus sage des Français. L'avis de M. de Gourville fut d'enlever à la fois tous les ministres des Églises protestantes. « Au bout de six mois, dit-il, la moitié de ces ministres abjurera, et on les lâchera dans le troupeau; l'autre moitié sera opiniâtre, et restera enfermée sans pouvoir nuire il arrivera qu'en peu d'années les huguenots, n'ayant plus que des ministres convertis, et engagés à soutenir leur changement, se réuniront tous à la religion romaine. » D'autres étaient d'avis qu'au lieu d'exposer l'État à perdre un grand nombre de citoyens qui a été si connu en Europe par tes agréments de sa figure et de son esprit, et par le service qu'il a rendu dans ta bataille, de Fontenoi. L'hôtet de Richelieu était le rendez-vous de la meilleure compagnie de Paris, et soutenait la réputation du Marais, qui était alors le beau quartier. Mme de Maintenon, qu'on appelait Mme Scarron, veuve du fils d'un conseiller de grand'chambre, d'une très-bonne famille de robe et petite-fille du fameux d'Aubigné, si connu sous Henri le Grand, allait fort souvent à l'hôtel de Richelieu, dont elle faisait les délices. Mme de Montespan voulant envoyer aux eaux de Baréges son fils le duc du Maine, encore enfant, qui était né avec une difformité dans un pied, cherchait une personne intelligente et secrète qui se chargeât de la conduite. La naissance du duc du Maine était encore un mystère. M. le duc de Richelieu proposa ce voyage à MmeScarron, qui n'était pas riche; et M. de Louvois, qui était dans la confidence, la fit partir pour les eaux secrètement avec le jeune duc du Maine. Il faut avouer qu'il y eut dans la fortune de cette dame une destinée bien étrange. Elle était née à Niort, dans la prison où son père était renfermé après s'être sauvé du château Trompette avec la fille du sous-gouverneur, nommé de Cardillac qu'il avait épousée ainsi elle était très-bonne demoiselle par son père et par sa mère, mais sans aucun bien. Son père avait dissipé le peu de fortune qu'il avait eu, et en chercha une en Amérique. Il y menasa Hile, âgée de trois ans; elle fut sur le point, en abordant sur le rivage, d'y être dévorée par un serpent. De retour en France, à l'âge de douze ans, elle logea chez la duchesse de Navaille», sa parente, qui ne lui donna que de l'éducation. Elle y changea de religion; car elle était née calviniste. Ce fut une fortune pour elle d'épouser scarron, qui ne vivait presque que de pensions et de ses ouvrages, qu'il appelait ta terre de Quwit, parce que Quinet était son libraire. Après la mort de son mari elle fit demander au roi par tous ses amis une partie de la pension dont Scarron jouissait, et le roi la fit attendre deux uu. Enfin, II lui en donna une de deux mille livres avant qu'elle menât II. le due du Maineaux eaux; il lui dit Madame, je «sus ai bien fat' attendre, mail /ai été jaloux devtu ami», et j'ai voulu que tout n'eussiez obligation SUR xoms îxrw 1748.: 147 qui avaient en main les manufactures et le commerce; on fît venir au contraire des familles luthériennes, comme il y en. a dans l'Alsace. L'autorité royale était affermie sur des fondements inébranlables, et toute: les sectes du monde n'auraient pas fait dans une ville une sédition de quinze jours. M. Colbert s'opposa toujours à un coup d'éclat contre les huguenots; il ménageait des sujets utiles. Les manufactures de Vai1robais et de beaucoup d'autres qu'il avait établies n'étaient maintenues que par des gens de cette secte. Après 'sa mort, arrivée en 1683, M. Le Tellier et M. de Louvois' poussèrent les calvinistes ils s'ameutèrent, on révoqua l'édit- de Nantes; on abattit leurs temples; mais on fit'la grande faute de bannir les ministres. Quand les bergers marchent, les troupeaux suivent. It sortit d'il royaume, malgré toutes les précautions qu'on prit plus de huit cent mille hommes, qui portèrent avec eux dans les pays étrangers environ un milliard d'argent, tous les arts, et leur haine contre leur patrie. La Hollande, l'Angleterre, l'Allemagne, furent peuplées de ces fugitifs. Guillaume III eut des régiments entiers de protestants français à son service. Il y a dix mille réfugiés français à Berlin, qui ont fait de cet endroit sauvage une ville opulente et superbe. Ils ont fondé une ville jusqu'au fond du cap de Bonne- Espérance1. Louis XIV fut très-malheureux depuis 1704 jusqu'en 1712; il soutint ses disgrâces comme un homme qui n'aurait jamais connu de prospérité. Il perdit son fils unique en 1711; et- il vit périr en 1712, dans l'espace d'un mois, le duc de Bourgogne son petit-fils, là duchesse de qu'd moi. M.le cardinal de Fleury, de la bouche de qui je tiens ce fait, m'a dit que le roi lui tint le même discours quand il lui donna 1 évêchéde Fréjus. Elle avait environ cinquante ans quand Louis XIV s'attacha à elle! II faut convenir qu'à cet âge on ne subjugue pas le coeur d'un roi, et surtout d'un roi devenu difficile, sansavoir un très-grand mérite. Il fautde ta complaisancesans empressement, de l'esprit sans envie d'en montrer, une flexibilité naturelle, une conversation solide et agréable l'art de réveiller sans cesse l'âme d'un hommeaccoutume à tout et dégoûté de tout, assez de force pour donner de bonsconseils, et assez de retenue pour ne les donner qu'a propos il faut enfin ce charme inexprimable qui enchaîne un esprit, et qui ranime les langueurs de l'habitude. Mmede Maintenon avait toutes ces qualités. Elle fit les douceurs de-la vie de Louis XIV depuis 1684jusqu'à la mort de ce monarque: L'Histoire de Reboulet dit qu'il l'épousa en présence de Bontemps et de Forbin mais ce fut M. de Montchevreuil, et non M. de Forbin, qui assista comme témoin. « La première femme du roi d'Angleterre Jacques II était fille du chancelier Hyde.Il s'en fallait beaucoup qu'elle fut d'aussi bonne de maison .que Mme Maintenon, et elle n'avait pas son mérite. Nous avons vu Pierre le Grand épouser une personne bien inférieure à ces deux dames; et cette épouse de Pierre le Granddevenir impératrice, et mériter de l'être. Le mérite fait disbaraitre bien des disproportions, et rapprochebien des intervalles. Unedes choses gui prouva combien Mmede Maintenon était digne de, sa fortune, c'est que jamais elle n'en abusa. Elle n'eut jamais la vanité de vouloir paraître ce qu'elle eétWaitt. sa modestiene se 1d!éèm'àJe;nitit point personneà lac(c)uorulr\~nuet utà'àses.peplllÛainnddir'ee délie. Elle se retirât à Saint-Cyraprès la mort de Louis XtV,et y vécut' d'une pension de quatre-vingt mille livres; c'était la seule fortunequ'elle se réserva. » 1. Dansl'édition de 1748on trouvé cette phrase, qui avait été supprimée dans le Merrwede 17SO,lorsque ce journal reproduisit les Anecdotessur Louié XIV « Quand1 Etat fut délivré de leur secte et privé de leur secours, les jansé- nistes voulurent prendre leur place et faire un parti considérable; ille fut quelque temps: Louis XIV en fut importuné les dernières années de sa vie; mais l'autorité les a écrasés et les convulsions tes ont rendus ridicules. » 148 ANECDOTES SUR LOUIS XIV. 1748. Bourgogne, et l'aîné de ses arrière-petits-fils. Le roi son successeur, qu'on appelait alors le duc d'Anjou, fut aussi à l'extrémité. Leur maladie était une rougeole maligne, dont furent attaqués en même temps M.de Seignelai, Mlled'Armagnac, M. de Listenai, Mmede Gondrin, qui a été depuis comtesse de Toulouse, Mmede La Vrillière, M.le duc de La Trimouille, et beaucoup d'autres personnes à Versailles. M..ee marquis de Gondrin en mourut en deux jours. Plus de trois cents personnes en"périrent à Paris. La maladie s'étendit dans presque toute la 'France. Elle enleva'en Lorraine deui enfants du duc. Si on avait voulu seulement ouvrir les yeux et faire la moindre réflexion, on ne se serait pas abandonné aux calomniesabominablesqui furent si aveuglément répandues; elles furent la suite du discours imprudent d'un médecin nommé Boudin, hommede plaisir, hardi, et ignorant, qui dit que la maladie dont ces princes étaient morts n'était pas naturelle. C'est une chose qui m'étonne toujours que les Français, qui _ont aujourd'hui si peu capables de commettre de grands crimes, soient si promptsà les croire. Le fameux chimiste Homberg, vertueux philosophe, et d'une simplicité extrême, fut tout étonné d'entendre dire qu'on le soupçonnait;- il courutvite,la Bastilles'y constituer prisonnier on se moqua de lui, et on n'eut garde de le recevoir; mais le public, toujours téméraire, fut longtemps imbu de ces bruits horribles, dont la fausseté reconnue devrait apprendre aux hommes à juger moins légèrement, si quelque chose peut corriger les hommes. Un des malheurs de la fin du règne de Louis XIV fut. le dérangement des finances; il commença dès l'an 1689. On fit porter tous,les meubles d'argent' orfévris à la Monnaie, en dépouillant sa galerie et songrand appartement de tous ces meubles admirables d'argent massif, sculptés par Ballin, sur les dessinsdu fameux l.ebrun; et de tout cela on ne retira que trois millions de profit. Onétablit la capitation en 1695 on fit.des tontines. M. de Pontchartrip, en 1696, vendit des lettres de noblesse à qui en voulait pour deux mille écùs, et ensuite «r