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L'ILIADE RHAPSODIES 19-20-21

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  L'ILIADE, Poème d'Ilion.  



 



Rhapsodies 19-20-21



 



Traduction : Charles Marie René Leconte de Lisle , 1818-1894.



 



1866



 



La guerre de Troie, les Achéens et les Troyens.



 



Troie ou Ilion.



 



Les Dieux et la guerre des hommes .



 



TEXTES :



 



https://fr.m.wikisource.org/wiki/Iliade_(trad._Leconte_de_Lisle)



 



https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k208054t.texteImage



 



Informations :



 



https://fr.wikipedia.org/wiki/Iliade 



 



Tête d'Homère, type d'Épiménide. Copie romaine d'après un original grec du Ve siècle av. J.-C.



 



https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Homeros_MFA_Munich_272.jpg#/media/File:Homeros_Glyptothek_Munich_273.jpg



 



EXTRAIT :



 



 



 



« Il parla ainsi ; mais Akhilleus sauta du rivage au milieu de l'eau, et le fleuve se gonfla en bouillonnant, et, furieux, il roula ses eaux bouleversées, soulevant tous les cadavres  dont il était plein, et qu'avait faits Akhilleus, et les rejetant sur ses bords en mugissant comme un taureau. Mais il sauvait ceux qui vivaient encore, en les cachant parmi ses belles eaux, dans ses tourbillons profonds.



 



Et l'eau tumultueuse et terrible montait autour d'Akhilleus en heurtant son bouclier avec fureur, et il chancelait sur ses pieds. Et, alors, il saisit des deux mains un grand orme qui, tombant déraciné, en déchirant toute la berge, amassa ses branches épaisses en travers du courant, et, couché tout entier, fit un pont sur le fleuve. Et Akhilleus, sautant de là hors du gouffre, s'élança, épouvanté, dans la plaine. Mais le grand fleuve ne s'arrêta point, et il assombrit la cime de ses flots, afin d'éloigner le divin Akhilleus du combat, et de reculer la chute d'Ilios.



 



Et le Pèléide fuyait par bonds d'un jet de lance, avec l'impétuosité de l'aigle noir, de l'aigle chasseur, le plus fort et le plus rapide des oiseaux. C'est ainsi qu'il fuyait. Et l'airain retentissait horriblement sur sa poitrine ; et il se dérobait en courant, mais le fleuve le poursuivait toujours à grand bruit.



 



Quand un fontainier a mené, d'une source profonde, un cours d'eau à travers les plantations et les jardins, et qu'il a écarté avec sa houe tous les obstacles à l'écoulement, les cailloux roulent avec le flot qui murmure, et court sur la pente, et devance le fontainier lui-même. C'est ainsi que le fleuve pressait toujours Akhilleus, malgré sa rapidité, car les dieux sont plus puissants que les hommes. Et toutes les fois que le divin et rapide Akhilleus tentait de s'arrêter, afin de voir si tous les immortels qui habitent le large Ouranos voulaient l'épouvanter, autant de fois l'eau du fleuve divin se déroulait par-dessus ses épaules. Et, triste dans son coeur, il bondissait vers les hauteurs ; mais le Xanthos furieux heurtait obliquement ses genoux et dérobait le fond sous ses pieds. Et le Pèléide hurla vers le large Ouranos :  — Père Zeus ! aucun des dieux ne veut-il me délivrer de ce fleuve, moi, misérable ! Je subirais ensuite ma destinée. Certes, nul d'entre les Ouraniens n'est plus coupable que ma mère bien-aimée qui m'a menti, disant que je devais périr par les flèches rapides d'Apollôn sous les murs des Troiens cuirassés. Plût aux dieux que Hektôr, le plus brave des hommes nourris ici, m'eût tué ! Un brave au moins eût tué un brave. Et, maintenant, voici que ma destinée est de subir une mort honteuse, étouffé dans ce grand fleuve, comme un petit porcher qu'un torrent a noyé, tandis qu'il le traversait par un mauvais temps !



 



Il parla ainsi, et aussitôt Poseidaôn et Athènè s'approchèrent de lui sous des formes humaines ; et, prenant sa main entre leurs mains, ils le rassurèrent. Et Poseidaôn qui ébranle la terre lui dit :



 



— Pèléide, rassure-toi, et cesse de craindre. Nous te venons en aide, Athènè et moi, et Zeus nous approuve. Ta destinée n'est point de mourir dans ce fleuve, et tu le verras bientôt s'apaiser. Mais nous te conseillerons sagement, si tu nous obéis. Ne cesse point d'agir de tes mains dans la rude mêlée, que tu n'aies renfermé les Troiens dans les illustres murailles d'Ilios, ceux du moins qui t'auront échappé. Puis, ayant arraché l'âme de Hektôr, retourne vers les nefs. Nous te réservons une grande gloire.



 



Ayant ainsi parlé, ils rejoignirent les immortels. Et Akhilleus, excité par les paroles des dieux, s'élança dans la plaine où l'eau débordait de tous côtés, soulevant les belles armes des guerriers morts, et les cadavres aussi. Et ses genoux le soutinrent contre le courant impétueux, et le large fleuve ne put le retenir, car Athènè lui avait donné une grande vigueur. Mais le Skamandros n'apaisa point sa fureur, et il s'irrita plus encore contre le Pèléide, et, soulevant toute son onde, il appela le Simoïs à grands cris :  



 



— Cher frère, brisons tous deux la vigueur de cet homme qui renversera bientôt la grande Ville du roi Priamos, car les Troiens ne combattent plus. Viens très-promptement à mon aide. Emplis-toi de toute l'eau des sources, enfle tous les torrents, et hausse une grande houle pleine de bruit, de troncs d'arbres et de rochers, afin que nous arrêtions cet homme féroce qui triomphe, et ose tout ce qu'osent les Dieux. Je jure ceci : à quoi lui serviront sa force, sa beauté et ses belles armes, quand tout cela sera couché au fond de mon lit, sous la boue ? Et, lui-même, je l'envelopperai de sables et de limons, et les Akhaiens ne pourront recueillir ses os, tant je les enfouirai sous la boue. Et la boue sera son sépulcre, et quand les Akhaiens voudront l'ensevelir, il n'aura plus besoin de tombeau ! »



 



 



 



 



 



 



 



 



    


Source: https://fr.m.wikisource.org/wiki/Iliade_(trad._Leconte_de_Lisle) https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k208054t.texteImage

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