Ils flottent
Enregistrement : Audiocite.net
Publication : 2008-03-10
Genre: Fantastique
Lu par Ka00
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Tous mes amis marins étaient là, morts, noyés dans la nuit dans le chavirage de notre bateau. Autour de moi ne flottaient que des débris de bois et quelques petits objets me rappelant notre vie. Celle qui était encore la mienne hier soir en allant me coucher. Le soleil était déjà haut dans le ciel et brûlait ma peau déchirée et couverte de sel. Comment avais-je survécu ? Je ne me rappelais rien du naufrage, seulement d'avoir vu le pont du navire basculer vers la droite en s'enfonçant sous les eaux quand j'avais finalement pu m'extraire des couloirs... Comment m'étais-je retrouvé sur ce pan arraché de la coque, flottant à peine sur ces eaux putrides, tout juste assez grand pour soutenir mon buste mais pas mes pieds. Je restais ainsi encore de longues minutes sans oser bouger, guettant le moindre bruit...
Eleken Traski
Non, pas ça… Ils étaient là.
Tous sans exception.
Leurs corps flottaient, porté par les vagues de l'Atlantique, leur pieds et leurs doigts rongés par les poissons, leur visages picorés par les mouettes, leurs yeux crevés d'ou s'écoulait encore sur certain une viscosité grise et révulsante. Ces corps qui n'avait plus d'humain que leur silhouette. Mes amis.
Tous mes amis marins étaient là, morts, noyés dans la nuit dans le chavirage de notre bateau. Autour de moi ne flottaient que des débris de bois et quelques petits objets me rappelant notre vie. Celle qui était encore la mienne hier soir en allant me coucher. Le soleil était déjà haut dans le ciel et brûlait ma peau déchirée et couverte de sel. Comment avais-je survécu ? Je ne me rappelais rien du naufrage, seulement d'avoir vu le pont du navire basculer vers la droite en s'enfonçant sous les eaux quand j'avais finalement pu m'extraire des couloirs… Comment m'étais-je retrouvé sur ce pan arraché de la coque, flottant à peine sur ces eaux putrides, tout juste assez grand pour soutenir mon buste mais pas mes pieds. Je restais ainsi encore de longues minutes sans oser bouger, guettant le moindre bruit. La présence des oiseaux m'indiquait que la côte ne devait pas être très loin. Mais de quel côté ? L'horizon se perdait dans le bleu de la mer et du ciel. Aucun son de ressac, pas de bruit d'autre bateau. Si ont exceptait le clapotis de l'eau contre ma barque de fortune et le piaillement des oiseaux joyeux de ce repas inopiné, il n'y avait pas un son. La mer elle-même était d'un calme horrible. Comme si elle attendait que je m'en aille pour reprendre vie.
J'avais beau me triturer l'esprit, je ne voyais aucune solution. Je pouvais nager, pendant que j'en avais encore la force, mais de quel côté. Si je me trompais, je m'éloignerais, si j'attendais, il y a fort à parier que les courants m'emporteraient vers le large. Désespéré, je me laissais aller à pleurer cette eau que je n'avais plus qu'en quantité limité. Pour la première fois depuis des années, je me suis laissé aller au désespoir. J'étais perdu. J'étais seul. J'allais mourir et je le savais. Ma fin serait terrible, j'allais brûler ici sous le soleil et crever de soif pendant des jours, si un orage ne survenait pas et me noyait sous des trombes d'eau devenues péril. Et tous les corps de mes amis morts ne tarderaient pas à attirer des légions de requins en quête de sang frais. Je ne pouvais rien faire.
Alors j'attendais, sans bouger, guettant l'horizon pour tenter d'y distinguer une terre ou un navire. Mais rien ne venait m'apporter le réconfort. Pire je devais régulièrement chasser les oiseaux qui venaient s'aventurer à picorer mes mollets nus. Et j'attendis, m'aspergeant régulièrement d'eau pour ne pas me dessécher. Mais le sel l'eau de mer le brûlait de plus en plus. Mes yeux fatigués me piquait et ma vue devint rapidement trouble. Si un bateau ne passait pas à moins d'un kilomètre, je ne le distinguerais même pas. Alors finalement je baissais les yeux et m'endormais comme cela. Je me réveillais la nuit. Les étoiles scintillaient au firmament loin au dessus de moi. Leur apparente gaieté me plongea une fois de plus dans le désespoir. Seul le petit air frais vint m'apporter un soulagement, mais il était écrasé par l'angoisse et l'obscurité qui m'entourait. C'est tout juste si je distinguais encore les corps de mes amis qui semblaient ne pas vouloir s'éloigner de moi. Je ne savais pas comment faire, pleurer parce qu'il m'était imposé la vue de ces hommes morts qui hier encore rigolaient en ma compagnie ou sourire de l'ironie du destin. J'avais de la compagnie. Les heures se suivirent sans changement, l'aube vint avec les oiseaux, puis la chaleur plomba mes pensées en un cafouillis sans aucun sens de flash et de paroles. Je divaguais ainsi toute la journée, parlant tout haut. Tiraillé par la faim et pire par la soif. Quelques fois je me suis risqué à en boire quelques gorgées amères. Mais je ne devais pas, sinon le sel allait me tuer. Mais qu'importe me suis dis-je. Le soleil ou la mer l'auront fait bien avant. Et le temps passa, continua et rien ne vint jamais m'apporter l'espoir. Durant la deuxième nuit, j'ai longuement hésité à me laisser aller sur le côté, pour mourir simplement d'épuisement et me noyer. Mais je n'ai rien fait de tel. L'espoir me menait, j'avais l'espoir, infime, qu'avant la fin, on me retrouve, ou que les courant ne m'amène à voir la côte. Tout ce temps, les petits débris ont disparu. Mais pas les corps. Comme me narguant, m'attendant, ils restaient autour de moi, s'éloignant parfois un peu, mais revenant toujours. Aucun ne disparu. Pas un requin ne vint s'en nourrir. Au deuxième jour je leur parlais pour me tenir compagnie. « Oh Gaston, comment va ta femme ? Et, toi Frédric, les gosses ? Et toi, le minot, toujours puceau ? ». Mais mes rires solitaires se perdant dans l'immensité de l'océan se perdirent bientôt dans le silence. Le troisième jour, je les détestais. Ils m'attendaient, j'en étais maintenant certain. Ils ne voulaient pas me laisser m'en sortir. Voilà pourquoi ils ne partaient pas, voilà pourquoi aucun ne coulait.
C'est le troisième jour que c'est enfin arrivé. J'ai ouvert les yeux après m'être assoupis, et j'ai d'abord cru à un rêve. Cette masse sombre à quelques encablures de moi, gros comme une maison. J'avais mal au crâne, j'avais mal aux yeux, à l'estomac, à la gorge, aux bras et aux jambes, mais j'ai quant même réussit à distinguer qu'il s'agissait là d'un bateau. Je ne distinguais rien des détails, ma vue trop troublée par les larmes qui les emplissaient mais je hurlais tout ce que je pouvais à son encontre. D'abord faiblement, mes poumons refusant le soudain effort, puis avec de plus en plus de violence. Et enfin, le bateau à répondu, deux coups brefs de sa corne et il a ralentit et a commencé à virer vers moi. J'étais sauvé, j'étais sauvé…
C'est alors que le premier cri emplie ma tête, rapidement suivi d'un autre, puis d'un troisième et enfin, ce furent d'innombrables cris qui frappèrent mon esprit. Ils criaient mon nom. Ils le criaient avec hargne, avec colère, avec rage, avec désespoir et violence. Et plus que tout, c'étaient les hurlements informes et inhumain qui me saisir d'effroi. Je me retournais, c'était eux qui hurlaient comme cela. Aucun ne faisait un mouvement ou n'ouvrait la bouche, mais c'est directement à mon esprit qu'ils criaient.
Etait-ce la folie qui me prenait… Certainement. Pourtant l'évidence me frappa sans espoir. Lentement ils se rapprochaient de moi, leurs yeux crevés me fixant depuis la mort. Je pouvais sentir leur haine affluer dans mes veines. Ils voulaient m'emmener avec eux, ce n'était pas juste que je survive et eux pas. Ils voulaient me noyer avec eux… Ils se rapprochaient de moi, lentement, mais horriblement vite, les détails de leurs visages ravagés de plus en plus précis. Je pouvais maintenant distinguer le léger mouvement d'ondulation, épousant les vagues, qu'ils faisaient pour se rapprocher. Je sautais à l'eau, et je commençais à nager avec mes dernières forces en direction du bateau. Mais déjà, ils m'entouraient, me barraient le chemin. Ils se rapprochaient. Je priais le Seigneur de m'aider, en faisant demi-tour, complètement perdu. Peut-être que sur le bout de coque, pourrais-je leur échapper. Je les sentais juste derrière moi tandis que je nager de toute mes forces vers cet espoir qui semblait s'éloigner de moi. Je les sentais me frôlant, tentant de m'agripper de leur bras morts. Leurs cris emplissaient toujours mon esprit. J'arrivais enfin à cet ilot que je venais de quitter…
Avec désespoir, je m'accrochais à ce morceau de bois, à ma vie qu'ils voulaient me prendre. Leurs mains dépourvus de doigts courraient sur mes jambes et mon dos, y répandant leur liqueur putride. Leurs cris me remplissaient de désespoir. Je hurlais encore et encore, tendant de leur donner des coups de pieds sans arriver à leur échapper. Un bras est alors passé autour de mon coup et mon hurlement fut étouffé, par l'eau salée qui emplie ma bouche alors que je coulais vers le fond…
Vers l'obscurité et le froid.
Vers le silence.
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Non, pas ça… Ils étaient là.
Tous sans exception.
Leurs corps flottaient, porté par les vagues de l'Atlantique, leur pieds et leurs doigts rongés par les poissons, leur visages picorés par les mouettes, leurs yeux crevés d'ou s'écoulait encore sur certain une viscosité grise et révulsante. Ces corps qui n'avait plus d'humain que leur silhouette. Mes amis.
Tous mes amis marins étaient là, morts, noyés dans la nuit dans le chavirage de notre bateau. Autour de moi ne flottaient que des débris de bois et quelques petits objets me rappelant notre vie. Celle qui était encore la mienne hier soir en allant me coucher. Le soleil était déjà haut dans le ciel et brûlait ma peau déchirée et couverte de sel. Comment avais-je survécu ? Je ne me rappelais rien du naufrage, seulement d'avoir vu le pont du navire basculer vers la droite en s'enfonçant sous les eaux quand j'avais finalement pu m'extraire des couloirs… Comment m'étais-je retrouvé sur ce pan arraché de la coque, flottant à peine sur ces eaux putrides, tout juste assez grand pour soutenir mon buste mais pas mes pieds. Je restais ainsi encore de longues minutes sans oser bouger, guettant le moindre bruit. La présence des oiseaux m'indiquait que la côte ne devait pas être très loin. Mais de quel côté ? L'horizon se perdait dans le bleu de la mer et du ciel. Aucun son de ressac, pas de bruit d'autre bateau. Si ont exceptait le clapotis de l'eau contre ma barque de fortune et le piaillement des oiseaux joyeux de ce repas inopiné, il n'y avait pas un son. La mer elle-même était d'un calme horrible. Comme si elle attendait que je m'en aille pour reprendre vie.
J'avais beau me triturer l'esprit, je ne voyais aucune solution. Je pouvais nager, pendant que j'en avais encore la force, mais de quel côté. Si je me trompais, je m'éloignerais, si j'attendais, il y a fort à parier que les courants m'emporteraient vers le large. Désespéré, je me laissais aller à pleurer cette eau que je n'avais plus qu'en quantité limité. Pour la première fois depuis des années, je me suis laissé aller au désespoir. J'étais perdu. J'étais seul. J'allais mourir et je le savais. Ma fin serait terrible, j'allais brûler ici sous le soleil et crever de soif pendant des jours, si un orage ne survenait pas et me noyait sous des trombes d'eau devenues péril. Et tous les corps de mes amis morts ne tarderaient pas à attirer des légions de requins en quête de sang frais. Je ne pouvais rien faire.
Alors j'attendais, sans bouger, guettant l'horizon pour tenter d'y distinguer une terre ou un navire. Mais rien ne venait m'apporter le réconfort. Pire je devais régulièrement chasser les oiseaux qui venaient s'aventurer à picorer mes mollets nus. Et j'attendis, m'aspergeant régulièrement d'eau pour ne pas me dessécher. Mais le sel l'eau de mer le brûlait de plus en plus. Mes yeux fatigués me piquait et ma vue devint rapidement trouble. Si un bateau ne passait pas à moins d'un kilomètre, je ne le distinguerais même pas. Alors finalement je baissais les yeux et m'endormais comme cela. Je me réveillais la nuit. Les étoiles scintillaient au firmament loin au dessus de moi. Leur apparente gaieté me plongea une fois de plus dans le désespoir. Seul le petit air frais vint m'apporter un soulagement, mais il était écrasé par l'angoisse et l'obscurité qui m'entourait. C'est tout juste si je distinguais encore les corps de mes amis qui semblaient ne pas vouloir s'éloigner de moi. Je ne savais pas comment faire, pleurer parce qu'il m'était imposé la vue de ces hommes morts qui hier encore rigolaient en ma compagnie ou sourire de l'ironie du destin. J'avais de la compagnie. Les heures se suivirent sans changement, l'aube vint avec les oiseaux, puis la chaleur plomba mes pensées en un cafouillis sans aucun sens de flash et de paroles. Je divaguais ainsi toute la journée, parlant tout haut. Tiraillé par la faim et pire par la soif. Quelques fois je me suis risqué à en boire quelques gorgées amères. Mais je ne devais pas, sinon le sel allait me tuer. Mais qu'importe me suis dis-je. Le soleil ou la mer l'auront fait bien avant. Et le temps passa, continua et rien ne vint jamais m'apporter l'espoir. Durant la deuxième nuit, j'ai longuement hésité à me laisser aller sur le côté, pour mourir simplement d'épuisement et me noyer. Mais je n'ai rien fait de tel. L'espoir me menait, j'avais l'espoir, infime, qu'avant la fin, on me retrouve, ou que les courant ne m'amène à voir la côte. Tout ce temps, les petits débris ont disparu. Mais pas les corps. Comme me narguant, m'attendant, ils restaient autour de moi, s'éloignant parfois un peu, mais revenant toujours. Aucun ne disparu. Pas un requin ne vint s'en nourrir. Au deuxième jour je leur parlais pour me tenir compagnie. « Oh Gaston, comment va ta femme ? Et, toi Frédric, les gosses ? Et toi, le minot, toujours puceau ? ». Mais mes rires solitaires se perdant dans l'immensité de l'océan se perdirent bientôt dans le silence. Le troisième jour, je les détestais. Ils m'attendaient, j'en étais maintenant certain. Ils ne voulaient pas me laisser m'en sortir. Voilà pourquoi ils ne partaient pas, voilà pourquoi aucun ne coulait.
C'est le troisième jour que c'est enfin arrivé. J'ai ouvert les yeux après m'être assoupis, et j'ai d'abord cru à un rêve. Cette masse sombre à quelques encablures de moi, gros comme une maison. J'avais mal au crâne, j'avais mal aux yeux, à l'estomac, à la gorge, aux bras et aux jambes, mais j'ai quant même réussit à distinguer qu'il s'agissait là d'un bateau. Je ne distinguais rien des détails, ma vue trop troublée par les larmes qui les emplissaient mais je hurlais tout ce que je pouvais à son encontre. D'abord faiblement, mes poumons refusant le soudain effort, puis avec de plus en plus de violence. Et enfin, le bateau à répondu, deux coups brefs de sa corne et il a ralentit et a commencé à virer vers moi. J'étais sauvé, j'étais sauvé…
C'est alors que le premier cri emplie ma tête, rapidement suivi d'un autre, puis d'un troisième et enfin, ce furent d'innombrables cris qui frappèrent mon esprit. Ils criaient mon nom. Ils le criaient avec hargne, avec colère, avec rage, avec désespoir et violence. Et plus que tout, c'étaient les hurlements informes et inhumain qui me saisir d'effroi. Je me retournais, c'était eux qui hurlaient comme cela. Aucun ne faisait un mouvement ou n'ouvrait la bouche, mais c'est directement à mon esprit qu'ils criaient.
Etait-ce la folie qui me prenait… Certainement. Pourtant l'évidence me frappa sans espoir. Lentement ils se rapprochaient de moi, leurs yeux crevés me fixant depuis la mort. Je pouvais sentir leur haine affluer dans mes veines. Ils voulaient m'emmener avec eux, ce n'était pas juste que je survive et eux pas. Ils voulaient me noyer avec eux… Ils se rapprochaient de moi, lentement, mais horriblement vite, les détails de leurs visages ravagés de plus en plus précis. Je pouvais maintenant distinguer le léger mouvement d'ondulation, épousant les vagues, qu'ils faisaient pour se rapprocher. Je sautais à l'eau, et je commençais à nager avec mes dernières forces en direction du bateau. Mais déjà, ils m'entouraient, me barraient le chemin. Ils se rapprochaient. Je priais le Seigneur de m'aider, en faisant demi-tour, complètement perdu. Peut-être que sur le bout de coque, pourrais-je leur échapper. Je les sentais juste derrière moi tandis que je nager de toute mes forces vers cet espoir qui semblait s'éloigner de moi. Je les sentais me frôlant, tentant de m'agripper de leur bras morts. Leurs cris emplissaient toujours mon esprit. J'arrivais enfin à cet ilot que je venais de quitter…
Avec désespoir, je m'accrochais à ce morceau de bois, à ma vie qu'ils voulaient me prendre. Leurs mains dépourvus de doigts courraient sur mes jambes et mon dos, y répandant leur liqueur putride. Leurs cris me remplissaient de désespoir. Je hurlais encore et encore, tendant de leur donner des coups de pieds sans arriver à leur échapper. Un bras est alors passé autour de mon coup et mon hurlement fut étouffé, par l'eau salée qui emplie ma bouche alors que je coulais vers le fond…
Vers l'obscurité et le froid.
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