AGENT DE L'O.M.U.
Un roman fanique d'André Borie

CHAPITRE VII : LA DIVINE HUILE DE TOATL
Section 7D

Les conteneurs de toatl se dressaient, énormes masses sombres, sur la partie nord du tarmac. Si le reste de l'astroport était éclairé, bien que l'activité soit peu importante, la zone de fret où stationnait la file de tankers était plongée dans l'obscurité, à peine visible sous la clarté blafarde de la petite lune. Vor'Gla et Lar'Lun menaient la petite troupe vers la tête du convoi qui devait quitter Coriolan à l'aube.

Le corps de Sandorf avait été sommairement enterré parmi les ruines, et Lar'Lun avait glissé dans la tombe les mains tranchées des trois adversaires tués par Arx. Personne ne posa la moindre question en ce qui concernait la symbolique de cet acte. Ils s'étaient aussitôt mis en route, le Coriolanais et l'Antilan muets et perdus dans des pensées qui n'avaient rien de gaies.

Les récipients géants contenant l'huile étaient reliés les uns aux autres par de courtes barres en terkonite qui assuraient la rigidité de l'ensemble du train. Celui-ci serait rattaché à un caboteur attendant en orbite que le convoi lui soit amené sous l'effet des moteurs antigrav.

Vor'Gla avait jeté son dévolu sur le premier conteneur, celui qui serait relié au vaisseau tracteur. Il ne donna aucune explication à son choix, se contentant de le signifier.

Lar'Lun portait la légère échelle télescopique qui devait leur permettre d'atteindre le sommet de la citerne où se trouvait la trappe de remplissage, car il n'était pas question d'utiliser les harnais anti-g dont l'énergie pouvait être repérée, fusse accidentellement. Quant aux futurs “ immergés ”, chacun tenait un sac contenant sa combinaison de survie.

Les fugitifs allaient atteindre leur objectif sans incident, lorsqu'une patrouille de police sortit de l'ombre et les aperçut.

Pour les deux groupes, la surprise fut réciproque. Mais parmi les fugitifs, il y avait deux guerriers aux réflexes exceptionnels, si bien que Masas et Arx étaient entrés en action avant même que leurs adversaires aient eu le temps de réagir. Ils ne leur laissèrent pas la moindre chance.

Le couteau de l'octopode lança des éclairs comme il se jetait au milieu du groupe ennemi, tandis que le pistolet à aiguilles de Masas crachait ses charges mortelles. En à peine cinq secondes, le corps de police de Coriolan II avait perdu six de ses membres...

La brièveté du drame avait rendue vaine toute tentative d'aide de la part de Goral, Stev, Corton et des deux indigènes. Sidéré par la rapidité et l'épilogue sanglant de l'action, le copilote soupira d'une voix cassée :

– Ben, merde alors !
Lar'Lun reprit rapidement ses esprits.
– Il faut les planquer quelque part. Sinon, votre promenade touristique risque d'être annulée.
Vor'Gla approuva :
– On va les emmener dans la station d'épuration du complexe. C'est là que je travaille.
– C'est loin ?
– Quelques centaines de mètres.
Il se pencha sur un des corps pour le soulever et s'exclama :
– Celui-ci n'est pas un policier !
Masas regarda de plus près :
– Tu as raison, c'est un Anti.
– Sans doute un prêtre du quatrième rang, peut-être même un néophyte, sans cela il nous aurait détecté, supposa Goral.
Masas eut un petit frisson rétrospectif :

– Et bien, pour une fois la chance nous aura souri au cours de cette fichue mission !
– Peut-être, tempéra Corton. Parce que je me demande bien pourquoi il y avait un Anti avec cette patrouille.
Est-ce qu'ils soupçonnent que nous puissions nous échapper dans les contenants d'huile ?
– Certainement pas, sinon ils auraient été sur leurs gardes, le rassura Stev.
– J'espère que tu as raison !