AGENT DE L'O.M.U.
Un roman fanique d'André Borie

CHAPITRE VII : LA DIVINE HUILE DE TOATL
Section 7A

Lar'Lun ne se laissa pas décontenancer par l'exclamation de Sandorf. Son oeil pinéal s'ouvrit, et il affirma d'une voix tranquille :

– Pas du tout, je crois que cette solution est bonne, parce que personne ne pensera que vous puissiez passer quinze jours plongés au sein d'un conteneur d'huile de toatl.
– À juste titre : c'est impossible !
Masas intervint :
– Qu'est-ce que le toatl ?
– Une huile tirée d'une plante de Coriolan II, qui sert au traitement des bois précieux de Merrel IV.
– Mais encore ?
Lar'Lun prit le relais de son frère de sang :
– Je suppose que vous connaissez tous le bois de Merrel ?
Et comme ils hochaient la tête affirmativement, il poursuivit :
– Ce bois, pour garder toutes ses qualités de grain et de longévité, nécessite un traitement prolongé dans l'huile de toatl. C'est pourquoi, un commerce régulier existe entre les systèmes de Coriolan et de Merrel, même si celui-ci ne fait pas partie des Mondes Indépendants. Les Merreliens l'ont d'ailleurs presque divinisée, tellement ils en sont tributaires pour l'obtention d'un produit sans le moindre défaut.

– Soit, mais je ne vois pas où tu veux en venir.
– Sandorf a bien compris, lui ! ironisa l'indigène, et ma solution ne lui convient pas. Pourtant, je persiste à penser que c'est la meilleure et la plus sûre.
– Explique-toi.
– Les quantités d'huile qui transitent entre les deux planètes sont très importantes, et leur transport par transmetteur ou même par cargo serait beaucoup trop onéreuse, aussi les dirigeants humains de ces deux mondes ont mis au point un système consistant à utiliser un train de tankers téléguidés. L'huile arrive à destination deux semaines après son départ d'ici. Et, gros avantage, sur l'astroport de Merrel IV, il y a un transmetteur qui peut vous mener directement sur un des mondes de l'Empire.
– Et tu penses que nous pourrions utiliser ces tankers pour nous échapper ?
– Un de mes cousins est contremaître sur le terminal de Veraz, d'où partent toutes les expéditions. Il ne devrait pas éprouver trop de difficultés à vous introduire dans l'un des conteneurs.
– Mais, n'importe quelle vérification au scanner montrera aussitôt qu'il y en un de vide, objecta Goral.
Sa réflexion déclencha une suite de barrissements joyeux, tandis que Sandorf se prenait la tête entre les mains d'un air accablé.

– Mais il n'y aura aucun tanker vide ! s'esclaffa Lar'Lun.
– Alors, je ne comprends pas.
– Tu vas tout de suite comprendre : les conteneurs seront pleins, et nous serons dedans, gronda Sandorf.
Les fugitifs se regardèrent interloqués, avant de quêter des explications supplémentaires. Le Coriolanais ne se fit pas prier :

– L'huile est très dense pour un liquide, et vous y serez totalement indétectables.
– Tu veux nous immerger dedans ? ! s'exclama Stev.
– Hon hon. Vous possédez des combinaisons étanches de survie, aussi vous devriez pouvoir supporter un séjour de quinze jours dans l'huile.
– Ca ne va pas ? ! s'écria Corton d'un ton incrédule.
– Hélas si ! Vous comprenez maintenant pourquoi l'idée de Lar'Lun ne m'a pas fait sauter de joie !
Lorsque tout le monde se fut calmé, Masas continua à interroger l'indigène, obtenant des réponses à toutes ses objections. Au bout d'un moment, elle s'adressa à Sandorf :

– Ce que vient de nous dire Lar'Lun se tient. Le voyage n'aura rien d'une partie de plaisir, ça c'est sûr, mais je crois que nous avons de bonnes chances de réussir.
– Si tout se passe effectivement comme le pense mon adorable frère de sang ! maugréa le chasseur.