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Illustration: Le parcours de l'oie Lilith - christian martin
Site de l'auteur

Le parcours de l'oie Lilith

(Version Intégrale)

Enregistrement : Audiocite.net
Publication : 2008-03-31

Lu par Ka00
Livre audio de 40min
Fichier Mp3 de 36,7 Mo

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Médecin généraliste dans un petit village prés de Nîmes, Christian MARTIN écrit en dilettante. Il laisse planer simplement l'inspiration dans le quotidien de son pays, où se mêlent nostalgie et souvenir, tranche de vie, drôle ou parfois sensuelle , le tout, souvent baigné dans la violence des dérives climatiques de la... Une soirée entre amis dans une austère maison cévenole. L'érotisme exige une obscénité légèrement sublimée (..) une obscénité poétique. BORIS VIAN


Christian Martin


L’oie blanche

C’était un week-end de Toussaint comme bien d’autres, gris et tristounet. Les portes des cimetières étaient comme de coutumes, gaies et colorées. Pierre, mon compagnon, et moi-même, Sacha, allions consoler Roland, mon ami d’enfance, qui vivait sa troisième séparation. Pour Pierre c’était la première réunion de ce genre. Moi j’aurais été des trois, et les deux premières furent une apothéose de rires, dans une beuverie sans nom, mais où chaque fois un évènement important se passa . L’initiale, fut il y a 20 ans. L’épouse de Roland et mère de ses enfants , le quittait pour un bel hidalgo et collègue de travail. Roland avait appelé ses amis à la rescousse, et nous sonnâmes présent . Il y avait Yannick mon ex-mari, Stéphane, un autre ami d’enfance. Laura, une copine désœuvrée et plaquée de frais, nous accompagnait. Nous allions rejoindre Roland dans le village où nous nous étions connus, Stéphane, Yannick et moi, pendant les vacances que nous passions ensemble, de l’enfance à l’adolescence. Mes parents possédaient une maison de famille qu’ils avaient sommairement retapée pour y venir l’été, comme les parents de Yannick et de Stéphane. Roland était l’autochtone.

Cette fois-là, donc, après quelques pleurs d’usage, que notre présence assécha, Roland flasha pour Laura qui le consola le soir même, devenant pour quelques années, sa compagne. Mission accomplie, nous retournions en plaine le lendemain, sans Laura !

Le village était accroché en haut des gorges du Chassesac, près de Villefort et au pied d’un château moyenâgeux. Le lieu pittoresque, se noyait dans les châtaigneraies et les genêts. Il fut le berceau de tous mes émois d’enfant puis d’adolescente, le terrain de jeu, de batailles entre bandes rivales des villages voisins, de flirts, et enfin d’amour dans un calice d’herbe tendre avec Yannick, que j’admirais depuis toujours. C’était un prince charmant beau, fort et courageux que je dus, malgré moi, et à mon insu, partager avec plein d’autres princesses charmantes, pendant que j’élevais nos enfants.

Pierre découvrait les paysages cévenols d’automne et leur splendeur colorée, où le vert foncé des épicéas, se noie dans une palette chatoyante allant du brun au jaune tendre en passant par le rouge. Les feuilles jonchaient les bas-côtés de la route comme le ferait la neige dans quelques semaines. Par endroits c’étaient des châtaignes qui occupaient le territoire des feuilles mortes. Quelques automobilistes s’arrêtaient pour en ramasser et en faire le souper du soir au coin du feu.

La conversation dans l’automobile en vint immanquablement à évoquer la nouvelle séparation de Roland d’avec Patricia, sa dernière compagne. Pierre n’avait pas été surpris de la nouvelle et, comme je m’en étonnais, il répliqua un peu sèchement :

— Mais enfin Sacha, tu n’as pas vu son manège depuis ces années, elle en avait que pour son fric et ça se remarquait. Ce n’était pas le charme des Cévennes, ni le bide de Roland qui la faisait tenir. Elle voulait se marier, et quand elle a compris que Roland, pour une fois, serait ferme à ce sujet, elle est partie pour séduire le premier venu, avec le talent d’une nana qui affiche des heures de vol au compteur.

Des heures de vol au compteur, L’expression m’était encore inconnue. Née, sans doute, dans quelques hangars de l’aviation balbutiante, où les hommes régnaient encore en maîtres.

Je connaissais les filles faciles, celles que seul le train avait épargnées, je connaissais les baisables, les bonnes, voire, la plus salace : pignes au cul " mettables ". Mais pas celles qui affichaient des heures de vol au compteur.

Cette nouvelle expression du vocabulaire masculin m’offusqua un peu, juste un peu. Il faut reconnaître que les expressions, relatant le nombre de partenaires féminins du mâle, étaient plus restreintes et quelques part, moins péjoratives : coureur, tombeur, chaud lapin, au pire, baiseur. L’homme porte souvent ces étiquettes comme des blasons. Je répondais, un peu agacée :

— Le passé de Patricia ne nous intéresse pas, c’est hors sujet. Sa vie sexuelle avant Roland n’entre pas dans le débat.

Pierre perçut cette réponse avec un petit sourire.

— OK ! Ne le prends pas mal, tu as parfois des réactions d’oies blanches, quand on parle de l’amour.

D’oies blanches ! Encore une expression inconnue. J’imaginais très bien son sens : vierge éplorée, fleur bleue, romantique. Moi ? une oie blanche ? Peut-être oui. J’avais cru à l’amour avec Yannick, mon beau Yannick qui, avec l’âge et l’alcool, devint de moins en moins beau, de plus en plus lourd de silhouettes et d’esprit.

Je me replongeais, dans l’atmosphère de la deuxième séparation de Roland, il y a 10 ans. Encore une fois Yannick, Stéphane et moi accourions. Le repas fut copieux et arrosé comme de coutume, et Yannick, comme de coutume, depuis quelques années, fut saoul. Stéphane devait partir tôt le lendemain matin, aussi avait-il quitté la table à une heure raisonnable, sobre comme toujours.

Nous nous sommes retrouvé seuls, Roland et moi, pour transporter mon mari, ivre mort, sur l’un des lits jumeaux de notre chambre. Un peu essoufflé Roland s’assit près de moi sur l’autre lit. Sous les ronflements tonitruants de mon ivrogne d’époux, il me raconta sa séparation douloureuse d’avec Laura, ses déboires avec ses enfants qui ne supportaient pas leur belle-mère et vice-versa. Bref, il raconta la longue liste de tous ces petits compromis anodins, ces petites tracasseries qui font le quotidien des couples recomposés et qui leur bouffent la vie. Par moment, et je pense l’alcool aidant, il pleurait sur mon épaule, je lui caressais les cheveux. Il m’embrassait sur la joue, je l’embrassais sur le front. Il était comme un frère Roland, et je le consolais en sœur, jusqu’à ce qu’il aventure ses lèvres sur mon cou et que je le laisse faire.

Bientôt ses mains qui câlinaient mon dos par-dessus le pull, se glissèrent sur ma peau. Des frissons m’envahirent, je laissais aller ses doigts, je laissais aller mon corps qui s’allongea sur le petit lit. Nos lèvres s’effleurèrent, puis je saisis son cou et appuyais ma bouche, mon corps, mon bassin contre le sien. Une main glissa doucement sous mon soutient gorge, je relâchai mon étreinte un instant, histoire de me poser une question qui demeura sans réponse, j’arrête ?

Puis au rythme des ronflements de Yannick, si proches que je sentais parfois son souffle alcoolisé sur ma peau, nos corps nus dansèrent un voluptueux ballet, accompagné d’un duo de gémissement psalmodiant notre jouissance. L’oie blanche s’était offert une nuit d’amour, extraconjugale, presque incestueuse, avec un ami d’enfance et sur le lit jouxtant celui de son mari endormi.

Voilà la seule aventure adultère de l’oie blanche, pensais-je. Mais quelle aventure ! Mon Dieu que ce fut bon ! Bref, mais bon.

Nous partions Yannick et moi le lendemain. Il n’y eut pas de suite à cette étreinte, nous n’en avons jamais parlé, même dans les rencontres épisodiques qui suivirent. Je divorçais d’avec Yannick un an plus tard, lassée de sa lente descente aux enfers de l’alcoolisme, pour rencontrer Pierre, l’homme de ma vie, et compagnon depuis 10 ans.

Pierre est un homme merveilleux, attentionné, doux, amoureux encore et sobre, le rêve, enfin, mon rêve. Pas macho pour deux sous, mais bon, c’est un homme, et il a du mal à l’oublier quand il parle des femmes, même s’il fait des progrès.

Mais peut toujours mieux faire !

Une arête de l’oie blanche, ce jour-là, avait dû me rester coincée dans la gorge. Je restais donc muette jusqu’à notre arrivée dans le village.

Je pus, à loisir, observer le paysage, et les mille recoins de mon enfance, aux abords du hameau.

Surtout le mûrier, là dans le champ, c’était un soir d’août, l’air exhalait des parfums de foin coupé, je devais avoir 14 ans ou 15, je ne sais plus exactement. Stéphane m’avait pris la main en regardant les étoiles. Cette main m’a bouleversée, je ne sais pourquoi. Est-ce sa douceur, sa chaleur, l’interrogation fugace de la signification de ce geste ? Enfin ce fut un plaisir que je ne ressentis plus en saisissant la main d’un amoureux pour la première fois. Nous nous sommes assis sous le mûrier centenaire, sa main a lâché la mienne pour la poser sur mon épaule. Nos visages se sont tournés l’un vers l’autre, et nos bouches se sont unies. Nos langues d’abord timides, ont tâté le terrain puis se sont livrées à une exploration méthodique de la cavité qui jusqu’alors était défendue .

Ne mets pas tes doigts à la bouche, c’est sale !

Ne lèche pas la cuillère de ton frère !

Jusqu’aux quelques gouttes de salive sur la joue qui me faisaient horreur lors d’un bisou, et que j’effaçais d’un revers de main avec précipitation.

Je ne sais plus si c’était la sensualité du baiser, ou bien la transgression d’un interdit, la remise en cause de l’hygiène élémentaire inculquée depuis l’enfance qui me donnait du plaisir.

Je m’étais, même, exceptionnellement, lavée les dents ce jour-là, prémonition ?

Le flirt dura quelques jours, en fait jusqu’à la fin très proche des vacances. Le dernier baiser se fit sous le mûrier. L’année suivante Stéphane ne semblait plus attiré par mon charme. C’est Yannick qui prit le relai, vous savez la suite.

Cependant j’ai gardé une immense affection pour Stéphane, pour ne pas dire autre chose. D’autant plus que des trois amis d’enfance, il resta au fil des ans, beau, svelte, toujours séduisant et distingué. Je ne le vis qu’une fois, accompagné d’une amie.

L’oie Lilith

L’accueil de Roland fut chaleureux, comme de coutume, il semblait peu affecté en comparaison de ses premiers déboires sentimentaux. Peut-être qu’au fil des séparations, le deuil de l’être aimé, qui s’en va, est plus facile.

Stéphane, toujours aussi séduisant et célibataire était là. Yannick, mon ex-mari, ne serait pas de la fête. Il était hospitalisé pour sa énième cure de désintoxication. Je le savais, et s’il avait dû être là, je serais montée seule. Pierre et moi-même n’avions guère envie de mélanger nos passés intimes.

Il y avait là un couple de voisins qui avaient retapé la ruine d’à côté : Virginie, belle quadragénaire, aux formes généreuses là où il faut pour les hommes, très élégante, trop pour le lieu et Gérard musculeux quinquagénaire en treillis « chasseur pêche et tradition ".

Enfin, parmi les invités, Raphaël, un bel hidalgo de 30 ans, tâcheron employé par Roland, depuis quelques mois, pour finir d’aménager en gîte, l’ancienne bergerie.

Le repas, bien arrosé, fut cordial, les rires et les blagues fusaient. Quelques salaces de Gérard faisaient rougir Virginie. Pierre et Stéphane ne buvaient pas. Moi je ne détestais pas le vin et je l’avoue, ce soir-là, encore moins que d’habitude.

Gérard, avait du mal à cacher des opinions très tranchées sur la couleur de peau de ses frères hommes. La longueur du sexe semblait aussi avoir son importance ainsi que le fut du canon de fusil et la flexibilité de la canne à pêche. La péninsule ibérique, semblait être le dernier refuge de la civilisation, encore que la présence de Raphaël, pour ne pas refroidir l’ambiance, y était pour beaucoup.

Au-delà de cette satanée Méditerranée et peut-être au-delà des Pyrénées, commençait le territoire des bronzés ! Au fil des allusions ou plaisanteries douteuses sur les étrangers de tout poil qui balisaient le discours de Gérard, Roland prenait une mine sévère, riait de moins en moins. Puis avec le tact et la mesure légendaire que je connaissais de mon hôte, il prit, avec une certaine solennité, la parole, interrompant la logorrhée de l’homme en treillis.

— Heu, Gérard, je m’excuse de t’interrompre mais la pièce où nous mangeons, considère-la comme un sanctuaire, où certains propos ne peuvent être prononcés. Pour deux raisons :

Il y a 60 ans des groupes de résistants se réunissaient ici même, il y avait mon père et mon grand-père parmi eux. Leurs combats périlleux et dangereux étaient contre le nazisme, certains juifs pourchassés se sont même cachés ici sous leur protection.

Il y a 30 ans à la fin de la guerre d’Algérie, quarante harkis ont été parqués ici, oubliés dans ce petit village perdu. Ils y ont fini leurs jours, déracinés, abandonnés. J’ai vécu parmi eux et deux familles vivaient céans. Alors sans vouloir te froisser, parlons de tout et rions de tout sauf des Juifs et des Arabes, si tu le veux bien ?

Gérard resta un instant silencieux, puis, enchaîna pour se défendre :

— Mais je n’ai rien contre les Juifs !

— Je n’en doute pas Gérard ! Roland lui fit un petit sourire bienveillant et un clin d’œil.

Pour dégeler l’atmosphère et détourner la conversation, je m’extasiai devant l’un des nombreux objets hétéroclites qui traînaient dans la pièce. Roland écumait tous les vides greniers de la région et revenait toujours avec quelque chose, qui s’ajoutait pour encombrer la salle un peu plus. J’imagine que cette passion ne devait pas être du goût de Patricia, son ex. Il faut avouer que les objets en question n’étaient pas d’une esthétique exceptionnelle. Mais, bon, celui-là attira mon attention.

C’était une boîte en bois, carrée large de 50 cm où était sculptée sur le couvercle une forme étrange. Enfin, étrange, il me semblait bien en percer la signification.

Roland la posa fièrement sur la table.

— Sacha, bravo ! C’est mon plus bel objet, il a une valeur inestimable et une histoire exceptionnelle. Je vois que tu flashes sur la sculpture. As-tu un problème ? Me dit-il en souriant .

Un peu gênée, je lui fis part de ce qu’elle m’évoquait.

— On dirait un sexe de femme !

Roland interrogatif et enfilant ses lunettes, me demanda de lui montrer. Je glissais alors mon doigt sur le verni brun pâle, effleurant ce qui m’évoquait les grandes lèvres, rigides un peu grossières puis les petites lèvres, festonnées, fines et tendres. Enfin plus haut, suspendu et semblant soutenir le voile de chair du sexe féminin, le clitoris, petit bouton lisse à la forme oblongue ou mon index s’attarda un instant. Relevant la tête, je pus remarquer un certain émoi dans les yeux de la tablée, ma caresse de l’objet semblait leur suggérer quelque chose de précis que l’oie blanche, que je semblais être, ne perçut pas tout de suite.

Roland se tourna vers Virginie.

— Et toi vois-tu la même chose ? Dit-il d’un air qui frisait la lubricité.

Elle était en face de moi et voyait donc la sculpture inversée. Elle posa doucement sa main aux ongles longs vernis de rouge pourpre, sur le couvercle de la boîte et en remontant doucement le long d’un cône cylindrique. Elle dit rougissante, un rien ingénue :

— On dirait plutôt un pénis en érection. Ses doigts, posément, atteignirent un renflement qui pour moi ressemblait à un cœur, elle en épousa lentement le relief, entre le pouce et l’index, pour arriver à la pointe où les deux doigts se rejoignirent enfin. Les mâles n’avaient rien perdu de cette lente exploration de ce qui lui semblait être un pénis. Sûr, qu’ils auraient aimé que ce fût le leur qui s’étala ainsi sur le couvercle.

Roland éclata de rire !

— C’est incroyable ! Et l’on dit que c’est nous, les hommes, qui avons l’esprit mal tourné !

Il prit la boîte et l’écarta de la table, pour la montrer à la verticale.

— Stéphane franchement tu vois quoi, là ?

Stéphane sans hésiter une seconde s’exclama :

— Une orchidée ! évidemment !

Évidement ! À la verticale et de loin, la fleur se révélait, à la vue de tous, dans toute sa splendeur aux formes ambiguës.

Virginie et moi avons eu, je pense, la même sensation de nous être fait piéger.

Je ne me démontais pas.

— Tout cela ne nous dit pas qu’est-ce qu’il y a dans cette boîte et en quoi elle est si extraordinaire ?

Roland prit un air solennel.

— Je l’ai trouvée au vide grenier de Villefort, c’est un jeu de l’oie. Il ouvrit le boîtier.

— Il daterait du début du 19e siècle, fin 18e.

J’observais le jeu, il paraissait ancien et les dessins des cases, un peu jaunis, conventionnels . Le dé était plus grand que de coutume.

Roland poursuivit ses explications :

— Il a une règle un peu différente.

Rien ne le différenciait pourtant, à première vue, d’un jeu de l’oie traditionnel. Tel que nous y jouions, il y a 40 ans, les après-midi pluvieux, entre un huit américains et un Monopoly. L’escalier, saute-mouton, la prison, le puits, l’hôtel, le terrible cimetière où l’on repart au début, le labyrinthe , les oies. Non, rien ne me paraissait inhabituel.

— La règle de ce jeu, que je tiens dans les mains, seule une femme tirée au sort pourra la lire.

Il brandit le dé.

— Virginie ! pair ou impair ?

Elle murmura :

— Pair

Roland jeta le gros dé sur la table. Il roula un peu et c’est le cinq qui sortit.

— Sacha tu seras donc, si tu le désires, et quand tu auras pris connaissance de la règle, l’oie Lilith !

Décidément, pensais-je, les oies me poursuivent aujourd’hui, après l’oie blanche, l’oie Lilith, quelle promotion !

Je prenais connaissance de la règle du jeu, pendant que Roland nous révélait que ce jeu était utilisé dans certains salons libertins de l’époque.

Sur chaque face du gros dé était dessinée une région du corps :

Le 6, les jambes ; le 5, Le ventre ; le 4, les fesses ; le 3, les épaules ; le 2, le thorax et le 1, le visage.

À croire que le jeu devait se jouer aussi dans les harems musulmans. En effet ces régions devaient être dévoilées chaque fois que le pion tombait sur l’une des cases clefs,(escalier, prison, puits…)

D’autres particularités concernaient ces cases, mais j’y reviendrai. La règle fondamentale était que l’oie Lilith avait tout pouvoir pour imposer ses propres règles ou arrêter le jeu quand bon lui semblait. Cette règle me plaisait, j’étais maître du jeu, maître de la destinée, de la nudité de chacun, maîtresse de bien d’autres choses à ma guise.

Je revendiquai haut et fort ce statut à mes partenaires, ce qui rassura, quelque part, Virginie qui flairait un piège infernal qui aurait pu s’achever dans elle ne savait quel mélange inégal.

Mes coéquipiers hommes, un peu méfiants, étaient cependant confiants. En effet, le nombre supérieur leur donnaient quelques espoirs de bons moments. Ce fut donc tout simplement que la tablée accepta ce jeu sulfureux.

Dès lors la valse du dé régla, les regards, les désirs, les phantasmes, mais aussi les peurs : celle de se dévoiler, d’exposer peut-être sa nudité, et son intimité. La jalousie aussi, j’imaginais mal Pierre dévisageant les beaux seins de Virginie, peut-être même les caresser devant moi. Les miens n’étaient pas vilains, mais petits, encore juvéniles, malgré mes 50 ans, bien droits et tendus, privilège des petites poitrines de rester fermes malgré le temps.

Le jeu se déroulait normalement, sauf si l’on tombait sur une case clef où l’on devait donc dévoiler une partie de son corps, jusque-là rien de très osé, simple effeuillage en perspective, un strip jeu de l’oie en quelque sorte.

Pierre en prison pour deux tours fit un 6 pour y parvenir, et donc, dut montrer ses jambes en enlevant son pantalon.

Là où la règle du jeu se corsait, c’est quand un joueur était rejoint par un autre sur la même case. Dans ce cas une épreuve spécifique était prévue mettant en jeu les deux occupants de la case. Virginie en fit les frais la première et tomba en prison avec Pierre en faisant un deux.

Je m’écriais :

— L’occupant de la prison doit lui-même dénuder la partie du corps désignée par le dé.

L’annonce fit grimacer Virginie qui jeta un regard inquiet sur son mari. Pierre impassible ne put cacher un début d’érection qui sculptait son slip d’une tuméfaction ronde. Virginie portait une robe très décolletée qui descendait aux genoux. Les jambes étaient couvertes de collants opaques brillants, tendus et moulants. Un gilet recouvrait ses bras et ses épaules, cachant partiellement son décolleté, ne laissant apparaître qu’une fente profonde entre deux collines de chair blanche et tendre. J’imaginais Pierre remontant doucement la robe, découvrant les jambes de Virginie moulées dans leurs collants, la chair du ventre et le nombril pour arriver sur un soutien gorge en dentelle rouge transparente qui écrasait une aréole sombre et deux pointes frissonnantes. J’imaginais ses doigts, glisser lentement dans son dos pour dégrafer en expert, je lui faisais confiance, les crochets tendus de la lingerie. Deux beaux seins lourds et blancs s’affaisseraient à peine, libérés de leur calice de broderie.

Eh bien, non, rien ne se passerait ainsi ! L’oie Lilith allait trancher.

— Virginie ne peut pas dévoiler ses seins, car elle porte une robe, elle n’a pas à dévoiler son ventre en même temps !

Pierre trouva la sentence un peu partiale

— Attends comment veux-tu dévoiler le thorax sans découvrir le ventre ?

J’élevai le ton.

— Je te rappelle que personne ici ne peut contester les décisions de l’oie Lilith, on ne pourra donc dévoiler le thorax que lorsque le ventre ou les épaules seront déjà dévoilés !

Pierre rengaina son érection naissante et baissa la tête en guise de soumission.

Virginie, se retrouva, tout de même, torse nu , une case clef plus tard, pour le plus grand bonheur de la gent masculine et curieusement de son mari, fier, quelque part, d’exhiber les seins de sa femme. Où se met parfois la fierté ?

Virginie, le visage de pourpre et les bras croisés sur la poitrine, put protéger ainsi sa pudeur, entre deux lancers de dé. Stéphane et Pierre purent aussi faire admirer leurs pectoraux, encore que ceux de Pierre se noyaient dans un pannicule adipeux qui leur donnait une saillie très féminine, les poils en plus. Stéphane au contraire arborait un torse fin, musculeux juste ce qu’il faut et une peau glabre.

J’aimais bien caresser l’adiposité de Pierre, je n’aurais pas détesté glisser mes doigts sur le torse de Stéphane, passer en douceur sur sa peau fine, câliner et faire saillir ses minuscules pointes sombres.

Raphaël put montrer ses biceps avec ses épaules sous son débardeur, laissant présager une musculature de rêve. Une musculature de magazine, où de beaux mannequins masculins exposent des maillots, moulant des attributs alléchants.

Ou à lécher ! Allons donc, l’oie blanche était oubliée, l’oie Lilith laissait vagabonder ses fantasmes, s’imaginant à genou devant le bel éphèbe Raphaël et glissant doucement son slip jusqu’à faire jaillir, devant ses lèvres , un sexe dur et long.

Le dé faisait des dégâts à la pudeur, Roland dut se résoudre à tomber son caleçon et à montrer ses fesses, il sut habilement cacher le reste. Gérard nous fit un début de strip-tease, sans talent, pour enlever son tee-shirt et dévoiler un torse velu, et un ventre non moins velu et proéminent. Curieusement au fil du jeu, je pus constater que les hommes, montraient beaucoup d’empressement à exhiber leur torse, mais que le dessous de la ceinture restait difficile à dévoiler, peut-être que leur particularité anatomique à géométrie variable, les mettait dans une sorte de compétition à laquelle ils ne voulaient pas se soumettre, à l’exception de Gérard qui trépignait d’impatience de nous révéler ses attributs.

Virginie avait une pudeur feinte, quelque part savamment calculée, dévoilant des morceaux de seins à chaque lancé de dé.

Quant à moi, je fis tomber nonchalamment mon jeans pour révéler mon string et mon petit postérieur masculin ! J’étais trop absorbée, par les cases, et ma volonté de gagner, et de me faire respecter ; de plus les appas de Virginie semblaient plus convaincants.

Je caracolais devant, talonnée par Gérard. Ce qui me fit tomber dans le puits en faisant un 6. Mes jambes étant déjà dénudées, je pus préserver le reste de ma pudeur.

Mais Gérard tomba dans le puits avec moi en faisant un 4. Il descendit le treillis avec empressement, pour me montrer son anatomie intime. Je l’arrêtais là.

— Tu n’as pas encore dévoilé tes jambes, tu dois donc, comme Virginie, attendre pour dévoiler le reste.

Gérard remonta son pantalon en maugréant. Il n’aimait pas, manifestement, obéir à une femme, fut-elle l’oie Lilith.

La règle était claire, il pouvait caresser n’importe qu’elle partie de mon corps jusqu’à ce que je fasse un six.

Qu’allait-il choisir, une jambe, une cuisse, mes fesses, peut-être glisserait-il sa main jusque dans mon soutien-gorge.

Il posa une grosse main poilue sous mon nombril, les doigts écartés, elle descendit sur mon string, descendit toujours plus bas, effleurant bientôt la fente lisse du nylon, qui épousait une autre fente. Ses yeux lubriques me regardaient. Je fuyais son regard, et cherchais celui de Pierre qui serrait les dents, prêt à exploser, mais impuissant, car seule l’oie Lilith avait le pouvoir de changer le cours du jeu. Pouvait-elle interdire ce que la règle autorisait, quel crédit aurait alors ses décisions à venir, si elle ne laissait pas cette main odieuse courir sur son string. Je prenais très à cœur mon rôle de maîtresse du jeu, mais, à quel prix ? Même Virginie était gênée par le choix de son mari. Le dé passait vite de main en main pour accélérer le jeu et me libérer de cette sale patte qui pétrissait à présent le fin tissu et ce qu’il y avait dessous. Soudain alors que je prenais le dé, je sentis son majeur s’insinuer sous l’étoffe et plonger dans mon sexe, il en ressortit quand la face du 6 libérateur s’immobilisa. Alors je vis le geste odieux de Gérard. Il leva en l’air son majeur triomphal, tout brillant et humide de mon intimité et le porta à la bouche pour le sucer. Ce geste jeta un froid, un instant. Dès lors Gérard fut méprisé de tous. Plus aucune de ses plaisanteries ne dérida un visage. Il fut ignoré royalement, mais je ne suis pas sûre qu’il s’en rendit compte.

Je repris ma marche triomphale, vers le but ultime, j’y perdis mon pull, puis mon soutien-gorge.

Virginie tomba dans le labyrinthe. Elle y abandonna son collant, qu’elle roula délicatement pour découvrir un string, puis de longues cuisses pleines, qu’elle dévoila lentement, l’une après l’autre jusqu’aux pieds cambrés aux ongles vernis d’un blanc laiteux. Ses seins ondulaient doucement à chaque geste, quand elle se penchait en avant pour libérer l’extrémité de ses orteils.

Cinq paires d’yeux masculins ne perdaient rien des gestes interminables et distingués de Virginie. Gérard manifestait, quand même, un certain agacement à devoir partager le spectacle. J’avoue que les seins de Virginie ne me laissaient pas, non plus, insensible. Je ne sais pas pourquoi ? J’aurais aimé plonger mon visage sur ces coussins doux, les masser, avaler ses mamelons sombres et saillants.

Dans le labyrinthe, elle devait raconter un fantasme. Virginie, presque nue, se racla la gorge, un sourire ingénu aux lèvres. Elle ne savait, manifestement, pas quoi raconter. Nous étions pendus aux lèvres muettes de sa belle et grande bouche parée d’un rouge qui faisait pâlir son visage.

Elle écarta ses bras, croisés jusqu’alors, sur sa poitrine, libérant ses seins massifs et pourtant fermes. Ainsi exposée aux regards de la tablée, l’inspiration sembla l’envahir.

— Quand nous faisons l’amour Gérard et moi, et que je suis sur lui, j’imagine qu’un autre homme, entre dans la chambre et s’allonge sur moi pour me…

Gérard se raidit.

— Pour te quoi ? J’hallucine, elle ne veut jamais que je lui fasse et elle rêve qu’un autre homme la prend ainsi !

Virginie à son tour connaissait l’humiliation.

Roland et Pierre retenaient un fou rire, le dé poursuivait sa course folle. Ils tombèrent bientôt, dans la même case, devant se plier à la règle , Pierre posa une main sur les fesses de Roland en s’écriant :

— ça va ma poule ?

Le fou rire contenu explosa entre les deux copains, et gagna la tablée, comme une vague libératrice des tensions qui s’accumulaient depuis quelques cases. Même Gérard et Virginie cédèrent à l’allégresse.

Raphaël, par l’entremise de quelque six et de quelques oies, se trouva en tête et tomba en prison, nu comme un vers. Virginie vint le rejoindre avec son seul string. Là le premier occupant devait embrasser une partie du corps dénudé du nouveau venu en laissant passer deux tours.

La tension remonta d’un cran sur la table.

Raphaël ne pouvait cacher son émoi, une douce excroissance ferme et dure se tendit à mesure qu’il s’approchait de Virginie.

Il hésita un instant puis ses lèvres vinrent se coller sur celle de la belle invitée, qui ne tarda pas à les entrouvrir . Les deux corps se collèrent alors, le sexe de Raphaël sur le nombril de Virginie, la main de Virginie sur la nuque de Raphaël, les mains de Raphaël sur les fesses de Virginie. Ciel que ce baisé fut beau, qu’il fut long ! Pensez, deux tours ! Quelle chanceuse. Avait-elle mis un visage sur l’homme de son phantasme qui s’enfonçait dans son ventre, pendant que Gérard besognait dessous avec un sexe que j’imaginais trop mou, imbibé d’alcool, et trop hâtif pour lui donner la jouissance qu’elle espérait et qu’elle feignait, parfois, pour combler la fierté de son mari. Gérard camouflait mal sa rage, il faillit même intervenir pour interrompre l’étreinte mais l’oie Lilith veillait. Je me mis en travers de son passage, et sans dire un mot , j’élevai mon majeur à mon tour et le portai à ma bouche. L’allusion implicite stoppa net, l’élan du mari jaloux. La partie reprit, silencieuse. Il y avait, à nouveau, comme un froid sur les 63 cases du jeu. Virginie rejoignit le cimetière et reprit à la case départ, en pouvant se rhabiller, ce qui soulagea Gérard.

Le dé poursuivit son doux ronron, passant de main en main dans un silence glacial.

Je vins rejoindre Stéphane sur une case. Je portais toujours mon string, lui n’était toujours que torse nu. Qu’allait-il me toucher, me caresser. Je mourais d’impatience de sentir ses mains. Il me prit un pied, le posa sur ses cuisses, et doucement insinua ses doigts entre chaque orteil, puis caressa le dos de mon pied avant de prendre, à deux mains, la cambrure de la plante et lui imprimer de douces pressions avec les pouces. Tout mon corps était envahi de frissons jusqu’à mes seins qui se hérissaient de bonheur. Stéphane était kiné de métier, en homme de l’art il me faisait vibrer.

Le dé cruel envoya Roland au cimetière. Moi j’attendais mon tour et le bon chiffre pour finir la partie, Pierre aussi. Nous nous rencontrâmes dans l’avant-dernière case.

Il me prit la main et l’embrassa tendrement. Il n’avait pas le droit de m’embrasser sur cette case. Mais l’oie Lilith accepta le geste aristocratique qui faisait honneur à son rang.

Stéphane qui avait, entre-temps, découvert ses jambes, tomba en prison, et perdit son slip. C’est dans la tenue d’Adam qu’il accueillit Gérard en cette case. Le macho avait retrouvé le sourire depuis que Virginie, rhabillée, traînait dans les cases « d’en bas ». Avec un sourire carnassier il défia Stéphane.

— Heureusement que tu n’es pas Pédé ! Hein ? Sinon, Dieu sait où tu voudrais m’embrasser, dit-il en regardant le sexe en berne de son colocataire en riant aux éclats.

Stéphane silencieux regarda aussi, un instant son sexe, qui se raidissait puis fixa Gérard.

— Je suis homosexuel.

L’annonce fit l’effet d’un coup de canon. Gérard blêmit, se décomposa.

— Ha ! elle est bien bonne ! Tu plaisantes ?

Stéphane, gravement, fit non, d’un signe de la tête, regarda le sexe de Gérard et s’agenouilla. Le dé cessa de rouler joyeusement sur la table. Je ne savais que penser : faisait-il un coup de bluff pour se venger du personnage odieux qui sévissait depuis le début ?

Gérard s’écarta, apeuré, livide, sous le regard de tous. L’oie Lilith se devait de donner le coup de grâce.

— Mais Gérard, tu dois te plier à la règle du jeu, dis-je perfidement et avec autorité.

— Sinon la règle impose que tu quittes le jeu et le lieu.

Gérard enfilait déjà son treillis.

— Mais vous êtes tous malades, ici ! Je vais pas me faire sucer par une pédale !

Il prit Virginie par le bras, sans ménagement, et sortit de la pièce.

Les quatre hommes qui restaient, gardèrent les yeux fixés sur la porte qui venait de claquer, sans doute désolés de voir partir Virginie.

Soudain, ils entendirent le dé rouler dans leur dos.

C’était mon tour.

— Trois ! j’ai gagné ! Le gagnant peut choisir d’arrêter le jeu, ou d’assouvir tous ses fantasmes si l’oie Lilith est d’accord. Je choisis de finir la soirée avec le héros de la soirée.

Je pris Stéphane par la main, et l’entraînai vers la chambre, sous les regards stupéfaits des autres « vrais mâles normaux ». Que croyaient-ils ces bonobos, que l’oie Lilith allait se donner à tous les trois, ou pire encore, stopper le jeu là ? Ça, non !

Dans la chaleur de la chambre, je m’allongeai sur le ventre et demandai à Stéphane d’achever le massage qu’il avait commencé pendant le jeu. Après les pieds, ses mains envahirent mon corps dans un ballet de glissades et de pétrissages, des cuisses, au dos en passant par les fesses. Il me confirma son homosexualité, et me raconta sa vie. Comment il avait perdu son premier compagnon, emporté par le SIDA après 18 ans de vie commune. Comment il avait rencontré celui qui l’accompagnait à présent depuis 10 ans. Il m’expliqua sa souffrance de devoir cacher sa sexualité à ses parents et à ses amis. Seul Roland était au courant.

Ses mains professionnelles me possédaient, sa voix suave, à la fois mâle dans la fréquence et féminine dans ses intonations, m’apaisait.

Je me retournai soudain.

— Alors tu ne me désires pas ?

— Non. Dit-il doucement, tout en enchaînant son massage sur mes cuisses interrompant la lente ascension de ses mains aux portes de mon sexe.

Alors mes doigts glissèrent sur mon ventre, épousèrent, la peau lisse du mont de vénus soigneusement rasé, pour finir leurs courses sur un bouton tendre et doux, gâchette cachée et insaisissable du plaisir. Quelques passages suffirent pour inonder mon corps d’un plaisir intense, d’un orgasme dont les yeux neutres de Stéphane étaient les témoins.

Je me retournai sur le ventre, le corps encore saisi de soubresauts de bonheur, Stéphane vint s’allonger près de moi. Il me dit tout bas à l’oreille :

— C’était bien ?

— Oui ! délicieux. Lui répondis-je

Je m’endormis dans ses bras presque aussitôt.

Epilogue

Au matin, quand Stéphane et moi-même apparaissions dans la cuisine. Nous eûmes la surprise de voir nos trois amis déguisés en soubrette et les fesses à l’air, sous un tablier de cuisine.

— Maîtresse ! Maîtresse ! nous sommes à vos ordres. S’écriaient-ils en réprimant , difficilement , un fou rire.

La cuisine était rangée, la vaisselle faite, que du bonheur pour commencer la journée ! Le petit déjeuner fut joyeux, Stéphane nous promit de venir, accompagné de son ami, la prochaine fois. La date fut fixée. Les éclats de rire fusaient, à l’évocation de la soirée de la veille. La fuite de Gérard, les seins de Virginie ! Bon, passons, les hommes sont ainsi !

Quand nous sortîmes pour rejoindre nos voitures, Virginie balayait le devant de sa porte. Pierre, Stéphane et moi sommes allés lui faire une bise d’au revoir. Son fond de teint cachait mal un hématome sur une pommette.

— La prochaine fois c’est moi qui invite. S’écria-t-elle

Roland la convia à boire un café, elle accepta avec plaisir.

— Gérard est parti à la chasse pour la journée. Raphaël est là ? Se renseigna-t-elle . Roland acquiesça d’un hochement affirmatif de la tête et avec un petit sourire entendu.

Le ciel était bas et gris, un crachin glacial balayait avec un petit vent nos visages transis.

Les premiers kilomètres de route du retour furent silencieux entre Pierre et moi. Cette première intimité depuis la soirée, était un peu difficile.

C’est Pierre qui rompit le silence.

— Alors ta nuit d’amour avec Stéphane ?

— Bien merci.

— Je ne veux pas savoir ce que vous avez fait.

— Tu as raison, je ne te dirais rien, de toute façon. En revanche, je peux te faire tout ce que je ne lui ai pas fait, et tu peux me faire tout ce qu’il ne m’a pas fait. Dis-je timidement.

— Quand ça ?

— Tout de suite si tu veux.

La voiture, cahota quelques mètres après un virage serré pour emprunter un petit chemin, puis s’immobilisa au son du frein à main.

La brume envahissait la campagne, ses volutes caressaient le pare-brise. Bientôt, à l’orée d’un bois, quelque part en Cévennes, un véhicule se mit à tanguer et gémir de plaisir.


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